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CHAPITRE 21 Item 348 – Insuffisance rénale aiguë – Anurie

I. Définition et physiopathologie

II. Diagnostic

III.  Insuffisance rénale aiguë obstructive

IV. Insuffisance rénale aiguë obstructive : traitement et complications

V. Arbre décisionnel

Situations de départ

Diminution de la diurèse

Créatinine augmentée

Dyskaliémie

Protéinurie

Rédaction de la demande d’un examen d’imagerie

Demande d’un examen d’imagerie

Demande d’explication d’un patient sur le déroulement, les risques et les bénéfices attendus d’un examen d’imagerie

Hiérarchisation des connaissances

Rang

Rubrique

Intitulé

Descriptif

Diagnostic positif

Connaître les modalités du diagnostic d’une insuffisance rénale aiguë (IRA) et de sa sévérité (oligurie, anurie) chez l’adulte et l’enfant

Savoir analyser une élévation de la créatininémie en fonction du contexte clinique, de la notion de créatininémie antérieure et grader la sévérité en tenant compte de la créatininémie et de la diurèse, savoir diagnostiquer une IRA d’une insuffisance rénale chronique (IRC) ; reconnaître une IRA sur IRC

Physiopathologie

Connaître les principaux types et mécanismes d’IRA

Connaître les mécanismes d’IRA obstructive, d’IRA fonctionnelle et d’IRA parenchymateuse ; connaître le rôle de l’hémodynamique glomérulaire dans les mécanismes de l’IRA

Épidémiologie

Connaître la prévalence de l’IRA

Connaître la répartition des différents types d’IRA, sa prévalence hospitalière

Examens complémentaires

Connaître les modalités de prescription et d’interprétation des résultats des examens complémentaires utiles au diagnostic d’IRA

Savoir prescrire une échographie rénale et pelvienne à la recherche d’un obstacle sur les voies excrétrices ; prescrire un ionogramme sanguin et urinaire pour différencier une IRA fonctionnelle d’une IRA par nécrose tubulaire aiguë ; savoir interpréter une protéinurie et un sédiment urinaire dans un contexte d’IRA

Identifier une urgence

Connaître les situations nécessitant un avis spécialisé dans l’IRA

Savoir demander un avis néphrologique devant une IRA non expliquée et/ou associée à un syndrome glomérulaire ou tubulo-interstitiel aigu

Étiologies

Connaître les principales étiologies d’IRA par obstacle

Lithiases, cancer vésical, rétention aiguë d’urine par obstacle sous-vésical (adénome et cancer de la prostate)

Étiologies

Connaître les principales étiologies d’IRA fonctionnelle*

Circonstances de déshydratation extracellulaire et d’hypovolémie efficace ; facteurs favorisants des médicaments modifiant l’hémodynamique glomérulaire

Étiologies

Connaître les causes d’IRA par nécrose tubulaire aiguë*

Connaître les principales circonstances favorisantes (états de choc : sepsis, cardiogénique ; rhabdomyolyse, hémolyse, toxiques, médicaments néphrotoxiques)

Étiologies

Connaître les principales étiologies d’IRA glomérulaires incluant les vascularites*

Connaître les étiologies de glomérulonéphrites rapidement progressives nécessitant un avis et un traitement spécialisé urgent

Étiologies

Connaître les causes d’IRA liée à une atteinte tubulo-interstitielle aiguë*

Connaître les causes liées à un mécanisme toxique direct (notamment médicament et néphropathie à cylindres myélomateux, etc.) ou immunoallergique, infectieux

Étiologies

Connaître les principales causes d’IRA vasculaires*

Syndrome de microangiopathie thrombotique, hypertension artérielle maligne (HTAM), maladie des emboles de cristaux de cholestérol et les causes de syndrome hémolytique et urémique (SHU) chez l’enfant

Étiologies

Connaître les principaux médicaments ou produits responsables d’IRA*

Aminosides, cisplatine, anticalcineurines, PCI, etc. et connaître les principes de prévention de leur toxicité

Étiologies

Connaître les principales causes d’IRA chez l’enfant (SHU, déshydratation, choc, etc.) et les mesures hygiénodiététiques de prévention des SHU*

Identifier une urgence

Connaître les signes cliniques et biologiques imposant une prise en charge urgente en milieu spécialisé d’une IRA

Œdème aigu pulmonaire (OAP) de surcharge hémodynamique, acidose hyperkaliémique (ECG)

Prise en charge

Connaître les modalités d’adaptation de la prescription des médicaments et des examens complémentaires à la sévérité de l’insuffisance rénale*

Principes généraux des médicaments à élimination rénale et néphrotoxicité

Prise en charge

Connaître le traitement d’une IRA obstructive et la prise en charge d’un syndrome de levée d’obstacle

Savoir les indications et les méthodes de dérivation des urines ainsi que leurs complications, savoir compenser une hyperdiurèse de levée d’obstacle

Prise en charge

Connaître la prise en charge d’une IRA fonctionnelle liée à une déshydratation extracellulaire*

Savoir utiliser les solutés de remplissage (cristalloïdes)

Prise en charge

Connaître la prise en charge d’une IRA fonctionnelle liée à une insuffisance cardiaque*

Connaître les principes de la prise en charge d’un syndrome cardiorénal (optimisation de l’utilisation des diurétiques)

Prise en charge

Connaître les principes généraux de la dialyse*

Savoir que l’épuration extrarénale permet d’apporter un traitement symptomatique pour passer le cap de l’IRA

Prise en charge

Connaître les indications de la dialyse en urgence

Savoir que la dialyse est requise en cas d’IRA organique, anurique ou non, associée à des signes de défaillance viscérale (OAP) et métabolique (acidose hyperkaliémique)

Suivi et/ou pronostic

Savoir qu’un épisode d’IRA parenchymateux expose à une IRC à long terme et nécessite un suivi*

Suivi et/ou pronostic

Connaître les différentes évolutions possibles d’une nécrose tubulaire aiguë (NTA)*

Vignette clinique

Un patient de 73 ans est adressé aux urgences depuis son domicile pour une altération de l’état général associée à une désorientation temporospatiale. Il a pour principal antécédent une hypertension, une ACFA paroxystique et un diabète de type 2 non insulinorequérant. Le patient a dans ses traitements du ramipril (IEC), de la coumadine (antivitamine K), et de la metformine (biguanide).

L’anamnèse révèle une altération progressive de l’état général depuis plusieurs mois. Depuis 3 jours, cette altération de l’état général s’est rapidement majorée avec un patient confiné au lit depuis 48 heures. Son épouse rapporte également qu’elle trouve son mari désorienté depuis 24 heures.

À l’arrivée aux urgences, son examen clinique est le suivant.

  • Paramètres vitaux : fréquence respiratoire à 25 cycles par minute (polypnée), sans signe d’insuffisance respiratoire aiguë et avec une saturation à 94 % en air ambiant. La fréquence cardiaque est à 95 bpm et la tension artérielle à 150/100 mmHg (hypertension). Le patient est apyrétique.
  • Examen physique systématisé : l’état général est altéré (OMS 4). Le patient est confus. Il n’est pas capable de donner la date de ce jour et ne sait pas dire où il se trouve (désorientation temporospatiale). L’examen clinique retrouve un œdème blanc mou indolore prenant le godet au niveau des membres inférieurs jusqu’à mi-cuisse et au niveau des lombes. Les pouls sont bien perçus. Le temps de recoloration cutané est < 3 secondes. L’auscultation pulmonaire retrouve des crépitants à l’inspiration au niveau du tiers inférieur des deux champs pulmonaires. L’examen abdominopelvien retrouve un ventre souple dépressible et non douloureux. Il n’y a pas de douleurs à la palpation sus-pubienne. La percution lombaire retrouve une sensibilité de manière bilatérale.
  • Interrogatoire et examen orienté : l’interrogatoire orienté auprès de l’épouse du patient retrouve que celui-ci n’est pas allé uriner depuis maintenant plus de 48 heures. Il n’a pas d’antécédent urologique ou néphrologique connu. Le toucher pelvien (rectal) retrouve une masse dure pierreuse sur la face antérieure du rectum d’origine probable prostatique. Cette masse est responsable d’un blindage pelvien. Il n’existe pas de fécalome.

Devant ce syndrome œdémateux associé à une désorientation temporospatiale une numération de la formule sanguine et un ionogramme sont réalisés. La numération de la formule sanguine est sans particularité. Le ionogramme sanguin retrouve une créatininémie à 780 μmol/l contre 120 μmol/l il y a un mois (suivi dans le cadre de son diabète). On retrouve une urémie à 30 mmol/l. La natrémie est à 138 mmol/l, la kaliémie à 5,9 mmol/l, la calcémie corrigée est dans la normale.

Au vu des résultats biologiques, deux examens sont demandés : une échographie rénovésicale pour rechercher un obstacle sur les voies urinaires dans le cadre du bilan d’IRA et un ECG à la recherche de troubles du rythme dans le cadre du bilan du retentissement de l’hyperkaliémie.

L’échographie rénovésicale retrouve une dilatation des uretères et des cavités pyélocalicielles de manière bilatérale (dilatation du pyélon à 28 mm). Cette dilatation est retrouvée sur toute la longueur des uretères jusqu’à la jonction urétérovésicale. La vessie est vide sans urines retrouvées. L’échographie retrouve une masse pelvienne aux dépens de la prostate.

L’ECG réalisé retrouve des ondes T pointues de manière diffuse sans troubles du rythme.

Au total, on retient le diagnostic d’insuffisance rénale aiguë d’origine obstructive sur probable envahissement des uretères par une masse prostatique.

La prise en charge sera réalisée en urgence avec :

  • la réalisation d’un drainage des urines au-dessus de l’obstacle, c’est-à-dire au niveau du rein soit par la mise en place d’une sonde JJ bilatérale ou par la mise en place de sonde d’une néphrostomie. En cas de pose de néphrostomie, le bilan doit être complété d’un bilan d’hémostase avec INR (patient sous coumadine) pour prévoir une antagonisation ;
  • la prise en charge de l’hyperkaliémie avec mise en place d’un traitement médical adapté (cf. Item 267) ;
  • l’arrêt des traitements néphrotoxiques (ramipril) et des médicaments contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale (metformine).

Le patient sera ensuite hospitalisé pour :

  • surveillance de la résolution de l’épisode d’IRA ;
  • prévention du syndrome de levée d’obstacle avec mise en place d’une hydratation IV adaptée à la volémie du patient et au ionogramme sanguin et urinaire.

Dans un deuxième temps, un bilan d’exploration de la masse prostatique sera réalisé avec prescription de PSA, suivi d’une prise en charge adaptée de cette masse.

I. Définition et physiopathologie


Le diagnostic d’insuffisance rénale aiguë (IRA) tient compte de deux paramètres : l’élévation de la créatininémie (par rapport à la créatininémie antérieure connue du patient) et/ou la diminution du volume de la diurèse. La sévérité de l’IRA est classée en trois stades selon ces deux paramètres (tableau 21.1). En période aiguë, on ne peut pas estimer le débit de filtration glomérulaire (DFG) par les méthodes de calcul usuelles. Les formules de calcul de la clairance de la créatinine (CKD-EPI ou MDRD) ne sont valables que pour l’évaluation de la filtration rénale dans des contextes stabilisés et donc pour le diagnostic d’insuffisance rénale chronique (IRC). L’anurie est définie par l’absence d’émission d’urines (diurèse < 200 ml/24 h).

 

Tableau 21.1. Stade de l’insuffisance rénale aiguë.

Stades

Créatininémie

Diurèse

1

Augmentation de la créatininémie > 26 μmol/l en 48 h

ou

Augmentation de la créatininémie > 50 % en 7 jours

< 0,5 ml/kg/h pendant 6 à 12 h

2

Multiplication de la créatininémie > 2 en 7 jours

< 0,5 ml/kg/h pendant > 12 h

3

Multiplication de la créatininémie > 3 en 7 jours

ou

Créatininémie > 354 μmol/l en l’absence de valeur antérieure

ou

Nécessité de dialyse

< 0,3 m/kg/h > 24 h

ou

Anurie > 12 h

Source : Définition universelle de l’insuffisance rénale aiguë selon les KDIGO (Kidney Disease : Improving Global Outcome 2012).

Les valeurs normales de la créatininémie sont situées :

  • entre 60 et 107 μmol/l chez la femme ;
  • entre 80 et 115 μmol/l chez l’homme.

La filtration glomérulaire dépend de différents facteurs : de la pression du transcapillaire glomérulaire (pression d’ultrafiltration) – elle-même dépendante des résistances dans les artérioles afférentes et efférentes –, de la pression de la chambre urinaire, du débit sanguin général.

Ainsi les causes de la diminution de la filtration glomérulaire et de l’IRA peuvent être classées en trois groupes :

  • fonctionnelles : par hypovolémie, état de choc, insuffisance cardiaque, sepsis. Le parenchyme est intact. Dans un premier temps, la vasoconstriction de l’artère efférente maintient un DFG normal puis la pression de filtration baisse et l’IRA apparaît ;
  • parenchymateuses (organiques) : par lésions des différentes structures du rein (lésions glomérulaires, tubulaires, interstitielles ou vasculaires) ;
  • obstructives : liées à un obstacle réalisant une obstruction de l’ensemble des voies urinaires d’amont. C’est-à-dire, soit un obstacle sur le bas appareil urinaire (urètre, vessie), soit un obstacle bilatéral sur le haut appareil urinaire (uretère, pyélon). En cas d’anomalie rénale (rein unique anatomique ou fonctionnel), un obstacle unilatéral sur les voies excrétrices du rein sain peut être responsable d’une IRA. En cas d’obstacle complet (absence complète de passage des urines), l’IRA obstructive est associée à une anurie. En cas d’obstacle incomplet (passage partiel des urines sous l’obstruction), l’IRA obstructive peut être associée à une diurèse maintenue.

L’IRA est liée à une altération brusque des capacités d’excrétion du rein entraînant une rétention azotée et de nombreux troubles hydroélectrolytiques. Elle peut être anurique ou à diurèse conservée (diurèse > 500 ml/24 h). Les signes révélateurs d’IRA sont d’apparition plus tardive : nausées, vomissements, céphalées, diarrhées, œdème et troubles visuels.

II. Diagnostic

L’IRA est une diminution du débit de filtration glomérulaire d’apparition rapide entraînant une urémie et des troubles hydroélectrolytiques mettant en jeu le pronostic vital à court terme.

A. Préciser le caractère aigu

Contrairement à l’insuffisance rénale chronique (IRC), l’IRA se caractérise par une élévation de la créatininémie récente (< 1 mois). Il peut s’agir d’une IRA de novo. Mais il peut également s’agir d’une IRA sur IRC. En cas d’insuffisance rénale non connue, plusieurs éléments peuvent nous orienter vers une pathologie rénale chronique sous-jacente :

  • antériorité d’une créatininémie augmentée, antécédents de maladie rénale ;
  • une anémie ;
  • une hypocalcémie ;
  • une atrophie du parenchyme rénal (taille des reins < 10 cm).

De principe, toute insuffisance rénale non connue doit être prise en charge comme une IRA même en présence de signe en faveur d’une IRC.

Il faut toujours faire préciser si cette IRA est à diurèse conservée (> 500 ml/24 h) ou oligoanurique (200-500 ml/24 h) ou anurique (< 200 ml/24 h).

En cas d’absence de diurèse, il est important d’éliminer en urgence la présence d’un globe vésical (obstacle sous-vésical empêchant l’évacuation des urines) qui est le diagnostic différentiel de l’anurie (absence de filtration glomérulaire).

B. Éliminer une situation d’urgence

  • Hyperkaliémie: elle doit être systématique recherchée sur le ionogramme sanguin et un électrocardiogramme (ECG) doit être réalisé à la recherche d’une hyperkaliémie menaçante. En cas d’IRC, l’hyperkaliémie est souvent mieux tolérée.
  • Surcharge hydrosodée : HTA, œdème déclive, œdème aigu pulmonaire, hyponatrémie.
  • Syndrome urémique: nausées, vomissements, anorexie, confusion, astérixis, réflexes ostéotendineux vifs, épilepsie (éliminer un accident vasculaire cérébral, un syndrome hémolytique et urémique, une hyponatrémie).
  • Acidose métabolique.
  • Hypocalcémie secondaire à une hyperphosphorémie.
  • Infections : immunodépression.
  • Digestifs : ulcère de stress, gastrite. Risque de saignement majoré par la thrombopathie.
  • Surdosage en médicaments par augmentation de leur fraction libre ++.

C. Déterminer le type d’insuffisance rénale

La cause obstructive doit être évoquée systématiquement en première intention. Elle est à l’origine de l’IRA dans 10 % des cas.

Une échographie rénovésicale doit être demandée en première intention et permet son diagnostic en mettant en évidence une dilatation des cavités pyélocalicielles. L’échographie rénovésicale et abdominopelvienne cherche également à déterminer la nature de l’obstacle :

  • obstacle sous-vésical : on retrouve alors une dilatation des deux uretères et des systèmes pyélocaliciels associée à une vessie en réplétion en lien avec une rétention aiguë d’urine ;
  • obstacle urétéral : on retrouve une dilatation des deux uretères et des systèmes pyélocaliciels ou en cas de rein unique, anatomique ou fonctionnel, une dilatation du côté sain associée à une vessie vide.

Si l’origine obstructive est confirmée (dilatation du système urinaire), en l’absence d’obstacle précis identifié à l’échographie et en l’absence d’indication de dialyse en urgence, un scanner abdominopelvien sans injection pourra être demandé afin de préciser l’origine de l’obstacle.

En l’absence d’origine obstructive, l’analyse du ionogramme sanguin et urinaire permettra d’orienter la démarche diagnostique vers une IRA fonctionnelle ou une IRA parenchymateuse, organique. Les étiologies et prises en charge des IRA non obstructives ne seront pas développées dans ce chapitre.

III. Insuffisance rénale aiguë obstructive

A. Étiologies

1. Obstacle sous-vésical[1]

  • Hypertrophie bénigne de la prostate (HBP).
  • Sténose de l’urètre.
  • Maladie du col vésical.
  • Phimosis serré.
  • Valves de l’urètre postérieur.
  • Vessie neurologique.
  • Iatrogène.
  • Obstacle intravésical : caillotage, tumeur de vessie.

[1] L’obstacle sous-vésical est plus amplement développé chapitre 20, Item 347 (« Rétention aiguë d’urine »).

2. Obstacle urétéral : bilatéral ou unilatéral sur rein unique

  • Intraluminal (calcul, nécrose papillaire aiguë).
  • Pariétal (tumeur urothéliale, tuberculose urogénitale, sténose radique, endométriose).
  • Extrapariétal (fibrose rétropéritonéale, tumeur pelvienne localement avancée, adénopathies lomboaortiques compressives).

B. Diagnostic

1. Interrogatoire

Il est important de rechercher à l’anamnèse des antécédents urologiques, notamment des troubles urinaires du bas appareil ainsi que des signes fonctionnels urinaires évocateurs (hématurie, douleurs lombaires, pollakiurie et brûlures mictionnelles [prostatite/HBP], fièvre [prostatite]).

On recherchera des antécédents personnels ou familiaux de néoplasies urologiques, digestives, gynécologiques et celui de douleur lombaire. Un tabagisme doit aussi être recherché.

2. Examen clinique

  • On s’attachera en premier lieu à éliminer un globe vésical. Les touchers pelviens (toucher rectal et vaginal) sont indispensables notamment à la recherche d’une HBP, d’une prostatite, d’un blindage pelvien.
  • On recherchera un contact ou une sensibilité des fosses lombaires.
  • On vérifiera l’absence de complications :

–     de l’insuffisance rénale : atteinte cardiaque, œdème aigu du poumon ;

–     de l’obstruction : sepsis urinaire.

3. Examens radiologiques

  • L’échographie des voies urinaires recherche une dilatation des cavités pyélocalicielles (fig. 21.1A et B). L’étendue de la dilatation de l’arbre urinaire dépendra du niveau de l’obstacle sur l’arbre urinaire.

Il faut noter que dans de rares cas, l’échographie peut ne pas retrouver de dilatation des cavités pyélocalicielles (fig. 21.2). Un scanner abdominopelvien complémentaire peut alors être utile :

–     en cas d’obstacle d’installation brutale ou récente, la dilatation des cavités peut ne pas être majeure ;

–     en cas de fibrose rétropéritonéale ou d’antécédent de radiothérapie abdominopelvienne : les cavités pyélocalicielles n’ont pas la capacité de se dilater malgré l’obstruction qui est réelle ;

–     en cas de déshydratation avec anurie.

  • Le scanner abdominopelvien peut compléter l’échographie et aider au diagnostic de la cause surtout en cas de lithiase et de tumeur pelvienne (fig. 21.3 à 21.5).
  • L’uro-tomodensitométrie (uro-TDM) est contre-indiquée car l’injection de produit de contraste iodé est à proscrire dans ce contexte.
  •  L’uro-imagerie par résonance magnétique (uro-IRM) pourrait permettre de visualiser les voies excrétrices mais est souvent difficile à obtenir en urgence.

     

Fig. 21.1.  A et B. Dilatation des cavités pyélocalicielles visibles sur une échographie.

Fig. 21.2.  Rein non dilaté en échographie.

Fig. 21.3.  Calcul urétéral gauche visible sur un scanner sans injection.

Fig. 21.4. Dilatation des cavités rénales gauches en amont de ce calcul visible sur un scanner sans injection.

Fig. 21.5. Obstruction des méats urétéraux par une tumeur vésicale. 

IV. Insuffisance rénale aiguë obstructive : traitement et complications


A. Traitement

Il faut dans un premier temps éliminer les indications de dialyse en urgence (encadré 21.1).

Encadré 21.1

Indication de la dialyse en urgence

Les indications de la dialyse en urgence sont :

  • hyperkaliémie symptomatique avec anurie ;
  • œdème aigu pulmonaire résistant au diurétique ;
  • hyperhydratation avec hyponatrémie (troubles de la conscience) résistant au diurétique ;
  • acidose métabolique sévère (pH < 7,2).

Le principe clé du traitement de l’insuffisance rénale obstructive est : la dérivation des urines en urgence. L’indication à une dérivation est d’autant plus urgente que l’IRA est associée à une hypo-/hyperkaliémie, une surcharge hydrosodée, un sepsis.

  • Si le patient est en globe, il convient de dériver les urines par sondage vésical ou pose d’un cathéter sus-pubien. Les différentes indications sont précisées au chapitre 20 (Item 347).
  • Si le patient est anurique sur une obstruction des uretères, la dérivation doit se faire au-dessus de l’obstacle (fig. 21.6). Elle est donc rénale et s’effectue en général au bloc opératoire :

–     soit par voie endoscopique avec la mise en place d’une sonde endo-urétérale : sonde urétérale droite ou sonde JJ ;

–     soit par voie percutanée avec la mise en place d’une sonde de néphrostomie posée par ponction directe transcutanée des cavités (celles-ci doivent donc être dilatées).

Pour rappel, la mise en place d’un cathéter sus-pubien ou d’une néphrostomie nécessite un contrôle de l’hémostase et la recherche des traitements anticoagulants et antiagrégants qui doivent être antagonisés au moment de la mise en place.

  • Si l’obstruction s’est déjà compliquée d’un sepsis, une antibiothérapie synergique et active sur les germes urinaires sera débutée au mieux après réalisation des prélèvements bactériologiques, avant si nécessité.

Le patient doit être hospitalisé pour surveillance de la résolution de l’épisode d’IRA, des complications liées au mode de drainage. Les médicaments néphrotoxiques sont temporairement arrêtés le temps d’obtenir une résolution de l’épisode d’IRA.

La fonction rénale doit revenir progressivement à ses valeurs antérieures. Si la décroissance est insuffisante, il faudra vérifier le bon fonctionnement du mode de drainage et chercher une cause aggravante (fonctionnelle ou organique). Toutefois, en cas d’insuffisance rénale chronique sous-jacente, de défaillance importante, la fonction rénale peut rester altérée.

 

Fig. 21.6.  Dérivation urinaire des reins.

À la droite de la patiente, dérivation des urines du rein par une sonde de néphrostomie. À la gauche de la patiente, dérivation des urines du rein par une sonde JJ.

Source : illustration réalisée par B. Mesnard.


B. Complications

1. De l’insuffisance rénale aiguë

La mortalité au cours de l’IRA en réanimation ou nécessitant la prise en charge en dialyse est en moyenne de 40 % toutes causes confondues.

Elle est liée à la maladie causale (choc septique ou hémorragique, convulsions, insuffisance respiratoire, grand traumatisme, pancréatite), au terrain et aux comorbidités du patient (âge, coronaropathie, insuffisance respiratoire, diabète, cancers), aux complications secondaires de la réanimation et en particulier aux infections nosocomiales.

Les complications métaboliques propres à l’IRA sont l’acidose métabolique et l’hyperkaliémie, la surcharge hydrosodée et le risque de dénutrition lié à l’hypercatabolisme azoté.

2. De l’obstruction

La stase urinaire peut se compliquer d’infection, de prostatite, de pyonéphrose et rapidement de septicémie. Il faut donc attentivement rechercher les marqueurs cliniques et biologiques d’infection, réaliser à titre systématique des prélèvements bactériologiques urinaires. Les urines peuvent être « faussement » stériles au-dessous de l’obstacle et infectées en amont.

3. De la dérivation urinaire

La principale complication est la survenue d’un syndrome de levée d’obstacle. Il s’agit d’une polyurie osmotique secondaire à l’incapacité secondaire à concentrer les urines. Elle est caractérisée par une polyurie parfois très abondante (débit urinaire > 200 ml/h), une hypokaliémie et une déshydratation extracellulaire. La prise en charge consiste en une compensation initialement volume à volume par des solutés intraveineux (dont le choix est adapté à l’ionogramme sanguin, dans la majorité des cas : soluté salé isotonique et/ou bicarbonate de sodium isotonique). La compensation sera progressivement diminuée dans les jours suivants avec la normalisation de la fonction rénale.

Il faut aussi surveiller les complications des modes de drainage :

  • saignement et ulcération au point d’entrée en cas de cathéter sus-pubien ou de néphrostomie ;
  • infection, plaie liée au mauvais positionnement de la sonde en cas de sonde vésicale ;
  • saignement, fistule artérioveineuse ou déplacement de la sonde en cas de néphrostomie.

V. Arbre décisionnel (fig. 21.7)

Fig. 21.7.  Arbre décisionnel.

Résumé

Rang

Descriptif

Connaître les trois mécanismes possibles de l’IRA :

– obstructif

– fonctionnel

– organique

Savoir prescrire et interpréter des examens complémentaires devant une IRA :

– le 1er réflexe devant une IRA est de réaliser une échographie rénovésicale afin de rechercher une obstruction

– une dilatation des cavités pyélocalicielles signe une obstruction. Mais l’échographie peut être normale même en cas d’étiologie obstructive

L’obstacle peut être de deux types :

– sous-vésical : on retrouvera alors un globe vésical

– urétéral : il sera alors bilatéral ou sur rein unique pour être responsable d’IRA

La prise en charge est une urgence et consiste en une dérivation des urines en amont de l’obstacle

Le drainage d’un obstacle sous-vésical s’effectue par sonde vésicale ou cathéter sus-pubien (chapitre 20)

Le drainage d’un obstacle urétéral est rénal : mise en place d’une sonde endo-urétérale (sonde JJ ou sonde droite extériorisée) ou par néphrostomie

Le traitement étiologique se fera dans un second temps

En cas d’hyperkaliémie menaçante, d’acidose importante ou d’hyponatrémie compliquée, l’hémodialyse devra être discutée avant un geste de drainage rénal

Après dérivation urinaire, il faudra surveiller et traiter la survenue d’un syndrome de levée d’obstacle

IRA : insuffisance rénale aiguë.

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