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CHAPITRE 17 Item 311 – Tumeurs du rein de l’adulte

I. Pour comprendre

II. Épidémiologie

III.  Facteurs de risque

IV.Formes histologiques

V. Diagnostic

VI. Diagnostics différentiels

VII. Conclusion

Situations de départ

 

Masse abdominale

Hématurie

Interprétation d’un compte rendu d’anatomopathologie

Tumeurs malignes sur pièce opératoire/biopsie

Anomalie des indices érythrocytaires (Hb, Ht, etc.)

Découverte d’une anomalie abdominale à l’examen d’imagerie médicale

Rédaction de la demande d’un examen d’imagerie

Demande d’un examen d’imagerie

Demande d’explication d’un patient sur le déroulement, les risques et les bénéfices attendus d’un examen d’imagerie

Identifier/reconnaître les différents examens d’imagerie (type/fenêtre/séquences/incidences/injection)

Consultation de suivi en cancérologie

Prévention/dépistage des cancers de l’adulte

Annonce d’un diagnostic de maladie grave au patient et/ou à sa famille

Hiérarchisation des connaissances

Rang

Rubrique

Intitulé

Descriptif

 

Épidémiologie

Connaître l’épidémiologie des tumeurs du rein

Y compris le pronostic

Épidémiologie

Connaître les facteurs de risque

Connaître les facteurs de risque, y compris les formes génétiques

Définition

Connaître les principaux types histologiques des tumeurs

Diagnostic positif

Connaître les présentations cliniques des tumeurs du rein

Savoir que ces tumeurs sont asymptomatiques dans un grand pourcentage des cas, évoquer les indications de consultation d’oncogénétique en cas de pathologies associées, connaître l’existence d’un syndrome paranéoplasique

Examens complémentaires

Connaître les indications des examens complémentaires nécessaires en cas de suspicion clinique de tumeur du rein

Savoir proposer un algorithme décisionnel des examens complémentaires utiles au diagnostic ; connaître les principaux critères diagnostiques radiologiques d’une tumeur maligne du rein, y compris les biopsies

Contenu multimédia

Exemple d’échographie d’un kyste rénal simple


I. Pour comprendre

La découverte d’une tumeur du rein est une situation relativement fréquente. Dans 70 à 80 % des cas, les tumeurs du rein sont découvertes de façon fortuite par des examens d’imagerie abdominale (échographie, scanner ou imagerie par résonance magnétique [IRM]) demandés pour une autre raison. Les tumeurs du rein peuvent aussi être révélées par des symptômes locaux (hématurie macroscopique, lombalgie) ou généraux (altération de l’état général) qui témoignent souvent d’une maladie localement avancée ou métastatique. La majorité des tumeurs du rein sont malignes mais un certain nombre d’entre elles sont bénignes (notamment les petites tumeurs) ou ont un faible potentiel évolutif.

La plupart des tumeurs du rein ont un aspect solide (tissulaire) à l’imagerie. D’autres, moins fréquentes, se présentent sous une forme kystique. La démarche diagnostique n’est pas identique dans ces deux situations.

II. Épidémiologie

Le cancer du rein est le 6e cancer le plus fréquent. En France, il a été relevé 15 323 nouveaux cas de cancer du rein en 2018 soit une augmentation de son incidence de + 1,7 % par an chez l’homme et de + 1,4 % chez la femme entre 1990 et 2018. En 2018, le cancer du rein a été responsable de 5 589 décès en France soit un taux de mortalité de respectivement 5 et 1,5 décès pour 100 000 habitants chez l’homme et chez la femme (fig. 17.1). L’âge et le sexe sont deux facteurs de risque non modifiables, avec un sex-ratio d’1,5 homme pour une femme et un pic d’incidence entre 60 et 70 ans.

Fig. 17.1. Incidence et mortalité des cancers du rein en France selon la cohorte de naissance.

Source : © INCA, Estimations nationales de l’incidence et de la mortalité par cancer en France métropolitaine entre 1990 et 2018 (page 286).

Au moment du diagnostic, environ 10 à 20 % des cancers rénaux sont d’emblée métastatiques et environ 10 à 30 % le deviendront après néphrectomie pour un stade localisé. Les principaux sites métastatiques sont : le poumon, le foie, les os, les surrénales, le cerveau. Les tumeurs malignes du rein ont cependant la particularité de pouvoir métastaser dans n’importe quel organe et même plusieurs années après le diagnostic. L’autre particularité du cancer du rein est sa capacité à s’étendre dans le système veineux cave à partir de la veine rénale.

III. Facteurs de risque


Les facteurs de risque de cancer du rein sont :

  • le tabac ;
  • l’obésité ;
  • le sexe masculin ;
  • l’hypertension artérielle ;
  • l’insuffisance rénale ;
  • la transplantation rénale ;
  • l’exposition environnementale (trichloréthylène) ;
  • les prédispositions génétiques familiales :

–     la maladie de von Hippel-Lindau (gène VHL), qui prédispose aux carcinomes à cellules claires,

–     le cancer rénal papillaire héréditaire (gène MET), qui prédispose aux carcinomes papillaires,

–     la léiomyomatose cutanéo-utérine héréditaire (gène FH), qui prédispose aux carcinomes FH-déficient,

–     le syndrome de Birt-Hogg-Dubé (gène BHD), qui prédispose aux carcinomes chromophobes.

IV. Formes histologiques

 

A. Tumeurs rénales malignes

Près de 70 à 80 % des tumeurs du rein sont des tumeurs malignes. Les carcinomes les plus fréquents sont :

  • les carcinomes rénaux à cellules claires (CRCC) (75-85 %) ;
  • les carcinomes rénaux tubulopapillaires (CRTP) (12-14 %) ;
  • les carcinomes chromophobes (4-6 %).

Lorsqu’elles sont malignes, les tumeurs du rein doivent être décrites selon la classification TNM de 2018.

Le grade tumoral ISUP (International Society of Urological Pathology), qui a succédé à la classification Fuhrman, est utilisé pour les CRCC et les CRTP pour évaluer l’agressivité de la tumeur. Il va de 1 à 4 et on distingue souvent les tumeurs de bas grade (1 et 2) et de haut grade (3 et 4). Il est établi à partir de l’analyse de la tumeur (lorsqu’elle a été retirée) ou de la biopsie et repose sur la présence d’anomalies cytonucléaires.

 

B. Tumeurs rénales bénignes

Les deux plus importantes à connaître sont :

  • l’oncocytome (aussi appelé adénome oncocytaire) :

–     plus fréquent chez la femme,

–     il peut parfois avoir une cicatrice stellaire centrale visible sur les examens d’imagerie. La surveillance est une alternative à l’exérèse systématique pour les oncocytomes prouvées par biopsie ;

  • l’angiomyolipome :

–     c’est une tumeur bénigne qui associe trois composantes (adipeuse, musculaire et vasculaire),

–     c’est la seule tumeur bénigne dont on peut évoquer le diagnostic lorsqu’il y a une plage graisseuse (densité négative) à la tomodensitométrie,

–     c’est une tumeur rare (0,1 à 0,2 % de la population), plus fréquente chez la femme,

–     il est en général petit et isolé,

–     il est parfois volumineux et multiple et il faut alors évoquer une sclérose tubéreuse de Bourneville,

–     le risque principal de cette tumeur est un saignement. La surveillance est le traitement de choix de ces tumeurs. Toutefois, un traitement préventif peut être proposé par néphrectomie partielle ou artério-embolisation en cas de risque de saignement (volumineuse lésion, femme en âge de procréer, non-compliance ou non-accès à la surveillance, risque de traumatisme abdominal).

V. Diagnostic


A. Circonstances de découverte

A Dans près de 70 % des cas, les tumeurs rénales sont découvertes fortuitement à un stade asymptomatique à partir d’un examen d’imagerie.

Les tumeurs du rein deviennent symptomatiques dans les cas suivants :

  • lorsqu’elles sont volumineuses. Elles peuvent alors être responsables d’une pesanteur lombaire et sont palpées à l’examen clinique (masse lombaire) ;
  • lorsqu’elles envahissent les voies excrétrices. Elles peuvent alors être responsables d’une hématurie microscopique ou macroscopique ;
  • lorsqu’elles sont métastatiques. Elles sont alors associées à une altération de l’état général (asthénie, amaigrissement). Les métastases peuvent également être symptomatiques : dyspnée, douleurs osseuses, troubles neurologiques, etc. ;
  • dans certains cas, elles peuvent être associées à un syndrome paranéoplasique (hypercalcémie, polyglobulie, syndrome inflammatoire, fièvre inexpliquée, etc.).

Il faut envisager une forme génétique familiale de cancer du rein et proposer une consultation d’oncogénétique en cas de :

  • âge de survenue avant 45 ans ;
  • carcinome rénal papillaire ou chromophobe quel que soit l’âge du patient ;
  • types histologiques rares ;
  • tumeurs rénales multiples et/ou bilatérales ;
  • antécédent familial de cancer du rein ;
  • manifestations extrarénales évoquant une forme syndromique personnelle ou familiale.


B. Examen clinique

L’examen clinique d’un patient atteint d’une tumeur du rein comprend essentiellement la palpation de la fosse lombaire et l’évaluation de l’état général. En cas de cancer du rein métastatique, des signes neurologiques et des douleurs osseuses sont également recherchés.


C. Bilan biologique

Le bilan d’une tumeur du rein est simple :

  • dosage de la créatinine sanguine avec mesure de la clairance selon MDRD (modification of the diet in renal disease) ou, plus récemment CKD-EPI (chronic kidney disease-epidemiology collaboration) ;
  • numération-formule sanguine (NFS).

En cas de tumeur métastatique, il faut y ajouter :

  • bilan hépatique ;
  • lactates déshydrogénases (LDH) ;
  • phosphatases alcalines ;
  • calcémie ;
  • bilan de coagulation ;
  • plaquettes.

L’objectif du bilan est :

  • d’évaluer la fonction rénale ;
  • de déterminer les facteurs pronostiques (en cas de tumeur métastatique) ;
  • de dépister un syndrome paranéoplasique : anémie, hypercalcémie, cholestase, syndrome inflammatoire.


D. Imagerie des tumeurs du rein

La démarche diagnostique des tumeurs du rein repose essentiellement sur l’imagerie.

1. Échographie

C’est l’un des deux modes de découverte les plus fréquents d’une tumeur du rein.

L’échographie manque de précision et ne suffit pas en elle-même pour décider du traitement. Elle doit systématiquement être complétée par une tomodensitométrie (TDM) abdominale ou une IRM.

Elle permet de faire la différence entre tumeur solide et kystique (fig. 17.2).

Elle peut être couplée à l’injection de produit de contraste (échographie de contraste) pour aider à analyser les tumeurs kystiques de diagnostic difficile.

Fig. 17.2.  Échographie rénale permettant de découvrir une petite masse rénale droite.

Plage de densité négative donc graisseuse.

2. Tomodensitométrie abdominale avec injection

C’est l’un des deux modes de découverte le plus fréquent d’une tumeur du rein.

C’est l’examen de référence pour faire le diagnostic d’une tumeur du rein.

Il doit comprendre quatre temps : sans injection, artériel ou précoce, veineux ou tubulaire et excréteur ou tardif. Ce type de scanner est également appelé uro-TDM.

La TDM permet de caractériser la tumeur :

  • elle renseigne sur son caractère tissulaire (caractérisé par une prise de contraste significative de plus de 20 unités de Hounsfield [UH]) ou kystique ;
  • elle évalue précisément sa taille et sa topographie ;
  • elle peut montrer une zone de densité lipidique, graisseuse sur les coupes sans injection qui est caractéristique d’un angiomyolipome (fig. 17.3) ;
  • en cas de tumeur kystique, elle permet de classer la tumeur selon la classification de Bosniak.

Fig. 17.3. Scanner abdominal avec injection montrant un angiomyolipome du rein droit.

La TDM permet d’apprécier l’extension locorégionale d’une tumeur maligne :

  • envahissement veineux :

–     certaines tumeurs du rein (malignes dans leur grande majorité) ont la capacité d’envahir le système veineux,

–     le scanner montre alors un thrombus tumoral dans la veine rénale et éventuellement la veine cave (qui peut aller d’un petit bourgeon cave jusqu’à un envahissement de l’oreillette gauche) ; il est présent dans 5 à 10 % des tumeurs malignes (fig. 17.4) ;

Fig. 17.4. Scanner abdominal au temps portal qui montre une tumeur du rein droit avec un thrombus tumoral dans la veine cave inférieure.

  • envahissement d’organes de voisinage : foie (fig. 17.5), côlon, surrénale ;
  • présence d’adénopathies qui sont dans la grande majorité des cas lomboaortiques (fig. 17.6) ;
  • présence de métastases hépatiques.

La TDM abdominale doit être associée à une TDM thoracique pour faire le bilan d’extension de la tumeur.

Fig. 17.5.  Scanner abdominal avec injection qui montre une tumeur du pôle supérieur du rein droit qui envahit le foie (elle peut être classée T4).

Fig. 17.6.  Scanner abdominal qui montre une adénopathie rétrocave en rapport avec une tumeur du pôle supérieur du rein droit (que l’on ne voit pas sur cette image).


3. IRM rénale

Elle est moins irradiante que la TDM et le gadolinium, utilisé comme produit d’injection, est moins néphrotoxique que les produits de contraste iodés.

Elle est intéressante dans les situations suivantes :

  • altération de la fonction rénale (clairance MDRD < 30 ml/min) ;
  • exploration des lésions kystiques mal caractérisées par les autres examens d’imagerie ;
  • évaluation du niveau supérieur d’un thrombus veineux ;
  • suivi répété des patients porteurs de cancer héréditaire familial (afin de limiter l’irradiation répétée).


4. Biopsie d’une tumeur du rein

La biopsie d’une tumeur du rein est un examen simple, qui se fait sous anesthésie locale, par voie percutanée (fig. 17.7), sous TDM ou échographie et idéalement en ambulatoire.

Fig. 17.7.  Ponction sous scanner chez un patient qui a une petite tumeur de 2 cm de la lèvre antérieure d’un rein unique (le patient est sur le ventre pour la biopsie).

On devine le trajet de ponction de l’aiguille à biopsie.

La biopsie donne des renseignements diagnostiques et pronostiques :

  • nature de la tumeur : maligne ou bénigne ;
  • sous-type histologique si elle est maligne ;
  • grade de l’ISUP 1-2 (faiblement agressif) versus 3-4 (fortement agressif).

Elle peut ainsi aider à choisir une option thérapeutique en donnant une idée de l’agressivité de la tumeur.

Dans les centres expérimentés, la biopsie a une bonne performance diagnostique, notamment pour déterminer la malignité (> 95 %).

Les complications sont peu fréquentes (< 10 %) et le plus souvent mineures.

La biopsie n’est pas systématique et sa place est discutée. Elle est recommandée lorsque ses résultats sont susceptibles d’influencer la décision thérapeutique.

Les indications de biopsie sont :

  • avant de donner un traitement médical en cas de tumeur métastatique ;
  • en cas d’incertitude diagnostique sur l’imagerie (lorsqu’on pense qu’il peut s’agir d’une tumeur qui n’est pas un cancer du rein : sarcome, lymphome, métastase d’une autre tumeur) ;
  • avant traitement focal (thermoablation, cryoablation ou radiofréquence) d’une petite tumeur (≤ 4 cm) ;
  • avant une néphrectomie partielle difficile où le risque de totalisation et/ou complication chirurgicale est élevé.

Il est déconseillé de faire une biopsie lorsque :

  • il existe une suspicion de carcinome urothélial (risque de dissémination) ;
  • il existe un risque hémorragique majeur ;
  • l’imagerie est en faveur d’un angiomyolipome ;
  • la tumeur est kystique sans contingent solide.

5. Stratégie diagnostique

Tumeur tissulaire

La nature tissulaire de la tumeur est déterminée par l’échographie ou la TDM (rehaussement significatif > 20 UH de la tumeur au temps artériel).

→ Il y a des signes de métastases à distance.

Le contexte clinique est souvent évocateur :

  • altération de l’état général ;
  • perte de poids ;
  • anémie ;
  • parfois fièvre (le cancer du rein est une cause classique à rechercher dans le cadre des fièvres inexpliquées).

Le diagnostic est confirmé par la TDM, sans et avec injection, thoracique, abdominale et pelvienne qui montre des lésions secondaires qui peuvent être multiples : poumons, foie, adénopathies, etc. En cas de contre-indication absolue à l’injection de produit de contraste, on pourra réaliser une TDM thoracique sans injection et une IRM abdominale sans et avec injection.

En cas de maladie métastatique confirmée, une scintigraphie osseuse et une imagerie cérébrale (TDM ou IRM) sont à réaliser en cas de point d’appel clinique.

→ Il n’y a pas de signe d’extension à distance : la tumeur est localisée au rein.


Petite tumeur du rein

On parle de petite tumeur du rein en cas de tumeur tissulaire, isolée, de moins de 4 cm (fig. 17.8).

Fig. 17.8.  Scanner abdominal montrant une petite tumeur de 32 mm du rein droit.

Elle a été opérée et il s’agit d’un carcinome à cellules claires.

C’est une situation fréquente.

Les petites tumeurs sont le plus souvent découvertes de façon fortuite.

La TDM thoracique, abdominale et pelvienne est suffisante pour le bilan d’extension.

Il n’y a en général pas d’anomalie biologique associée.

Les petites tumeurs du rein sont malignes dans 80 % des cas et bénignes dans 20 % des cas.

Les examens d’imagerie ne sont pas suffisamment performants pour statuer sur la nature bénigne ou maligne sauf en cas de plage de densité graisseuse qui doit faire évoquer un angiomyolipome.

La biopsie percutanée peut être proposée pour confirmer le diagnostic avant de proposer un traitement dans les situations difficiles (patients avec lourdes comorbidités, rein unique, tumeurs bilatérales, tumeur dont l’exérèse chirurgicale est à risque de par sa localisation dans le rein).

Tumeur localisée de plus de 4 cm (T1b et T2)

Ce sont des tumeurs localisées qui n’ont pas dépassé la capsule du rein (fig. 17.9, vidéos 17.1 et 17.2).

Elles sont en général asymptomatiques et découvertes fortuitement.

Elles sont souvent malignes et, sauf cas particulier (personne âgée, tumeur complexe), la biopsie n’est pas nécessaire avant traitement.

Fig. 17.9. Reconstruction coronale d’un scanner abdominal injecté qui montre une tumeur de 6 cm du rein droit.

Elle a été retirée chirurgicalement et il s’agit d’un carcinome chromophobe.


Tumeur localement avancée

Ce sont des tumeurs du rein qui ne sont ni intracapsulaires (T1-T2), ni métastatiques (M1).

Elles sont malignes dans la grande majorité des cas.

Il est donc rare de devoir faire une biopsie et le traitement (chirurgical) est proposé sans preuve histologique.

Ce type de tumeur peut envahir la graisse périrénale (tumeur T3a, fig. 17.10), la veine rénale, la veine cave (fig. 17.11) et s’accompagner d’adénopathies lomboaortiques (fig. 17.12).

Ce sont ces tumeurs qui sont volontiers symptomatiques : hématurie, lombalgie, masse perceptible à la palpation et qui peuvent s’accompagner d’anomalies biologiques (anémie le plus souvent).

Fig. 17.10.  Tumeur du rein gauche qui envahit la graisse périrénale, ce qui a été confirmé par l’analyse histologique (carcinome à cellules claires classé pT3a).

Fig. 17.11.  Volumineuse tumeur du rein droit avec un thrombus cave.

Fig. 17.12.  Tumeur du rein droit avec adénopathies lomboaortiques.

Tumeur kystique

Elles représentent 5 à 10 % des tumeurs du rein.

Elles sont en général peu agressives.

Elles doivent être analysées par un scanner abdominal ou une IRM.

L’échographie de contraste peut être intéressante lorsque le scanner ou l’IRM ne permettent pas de conclure.

Un kyste simple est constitué d’une paroi très fine et a un contenu hydrique (fig. 17.13). Ces kystes

Fig. 17.13.  Kyste du pôle supérieur du rein gauche de 5 cm, dont la paroi est fine et le contenu hydrique et homogène.

C’est un kyste bénin (classé Bosniak I) qui ne nécessite ni traitement ni surveillance.

Certains éléments d’imagerie doivent faire considérer le kyste comme atypique, suspect ou franchement tumoral :

  • la présence de cloisons ;
  • l’épaississement de la paroi ou des cloisons ;
  • les calcifications ;
  • le rehaussement de la paroi ou des cloisons ;
  • la présence de végétations intrakystiques.

La présence d’un ou de plusieurs de ces éléments permet de caractériser le kyste selon la classification de Bosniak (tableau 17.1) :

  • les kystes bénins (Bosniak I ou II) ne nécessitent ni traitement, ni surveillance ;
  • les kystes bénins Bosniak IIF (pour follow-up, surveillance) sont à surveiller par imagerie annuellement durant 5 ans car ils peuvent évoluer/être reclassés Bosniak III (12 %) ;
  • les kystes Bosniak III (fig. 17.14) sont dits suspects et ont 50 % de risque d’être malins ; il est recommandé de les opérer ;
  • les kystes Bosniak IV (fig. 17.15) sont dits malins et doivent être opérés.

 

Tableau 17.1.  Classification de Bosniak.

Grade

Caractéristiques

Conduite à tenir

I

Kyste bénin avec une paroi fine sans cloisons intrakystiques, sans calcifications et sans composante tissulaire

Densité hydrique

Pas de rehaussement après injection du produit de contraste

Bénin (aucune surveillance)

II

Kyste bénin pouvant contenir une fine cloison

De petites calcifications peuvent être présentes dans la paroi du kyste ou au sein de la paroi

Pas de rehaussement à l’injection du produit de contraste

Bénin (kyste atypique ne nécessitant aucune surveillance)

IIF (pour follow-up)

Cloisons nombreuses et fines

Minime épaississement de la paroi ou des cloisons (≤ 1 mm)

Minime rehaussement de la paroi et des cloisons

Calcifications pariétales et des cloisons régulières

Kyste hyperdense et entièrement intrarénal et ≥ 3 cm

Probablement bénin mais à surveiller

III

Paroi épaisse et irrégulière

Calcifications épaisses et irrégulières

Rehaussement significatif de la paroi et des cloisons

Kyste suspect avec un risque > 50 % de malignité

IV

Kyste avec végétations intrakystiques se rehaussant

Paroi épaisse et irrégulière se rehaussant

Kyste malin

Fig. 17.14. IRM abdominale (séquence T2) qui montre un kyste Bosniak III du rein gauche avec des cloisons qui se rehaussent.

C’est un kyste qui a 50 % de risque d’être malin.

 

Fig. 17.15.  Scanner abdominal montrant un kyste de 5 cm du rein droit, avec des végétations qui se rehaussent, classé Bosniak IV (kyste malin).


IV. Diagnostics différentiels

Il faut distinguer les tumeurs primitives du rein qu’elles soient bénignes ou malignes des :

  • tumeurs secondaires : métastases ou localisations d’un autre cancer (poumon, mélanome, lymphome, etc.) ;
  • tumeurs de la voie excrétrice supérieure qui sont des carcinomes urothéliaux. Ces tumeurs peuvent envahir le parenchyme rénal. Elles sont plus rares et plus agressives et se manifestent généralement par une hématurie macroscopique et des crises de coliques néphrétiques.


VII. Conclusion


La découverte d’une tumeur du rein est une situation fréquente en pratique clinique.

La démarche diagnostique est surtout guidée par l’imagerie (TDM ou IRM).

La biopsie percutanée peut aider dans certains cas.

La majorité des tumeurs sont tissulaires. La prise en charge dépend du bilan d’extension, de la taille et des rapports de la tumeur.

Les tumeurs kystiques sont moins fréquentes et doivent être caractérisées par le scanner ou l’IRM pour être classées selon la classification de Bosniak.

Compléments en ligne

Des compléments numériques sont associés à ce chapitre. Ils sont indiqués dans le texte par l’icône . Ils proposent deux vidéos. Pour voir ces compléments, connectez-vous sur www.em-consulte/e-complement//478259 et suivez les instructions.

 


Vidéo 17.1.

Tumeur du rein droit sur un scanner abdominopelvien sans injection de produit de contraste.



Vidéo 17.2.

Reconstruction coronale d’un scanner abdominal injecté qui montre une tumeur de 6 cm du rein droit.

Elle a été retirée chirurgicalement et il s’agit d’un carcinome chromophobe.


Pour en savoir plus

Capitanio U, Bensalah K, Bex A, et al. Epidemiology of renal cell carcinoma. Eur Urol 2019 ; 75 : 74-84.

Ljungberg B, Bensalah K, Canfield S, et al. EAU guidelines on renal cell carcinoma: the 2014 update. Eur Urol 2015 ; 67 : 913-24.

Ljungberg B, Campbell SC, Choi HY, et al. The epidemiology of renal cell carcinoma. Eur Urol 2011 ; 60 : 615-21.

Bensalah K, Albiges L, Bernhard JC, et al. CCAFU french national guidelines 2016-2018 on renal cancer. Prog Urol 2016 ; 27(Suppl 1) : S27-51.

https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1166708716307023?via%3Dihub



Bensalah K, Bigot P, Albiges L, et al. CCAFU french national guidelines 2020-2022 on renal cancer. Prog Urol 2020 ; 30(12S) : S2-S51.

www.urofrance.org/base-bibliographique/ recommandations-en-onco-urologie-2016-2018-du-ccafu-cancer-du-rein



Defossez G, Le Guyader-Peyrou S, Uhry Z, et al. Estimations nationales de l’incidence et de la mortalité par cancer en France métropolitaine entre 1990 et 2018. Synthèse. Saint-Maurice : Santé publique France, 2019.

https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/cancers/cancer-du-sein/documents/rapport-synthese/estimations-nationales-de-l-incidence-et-de-la-mortalite-par-cancer-en-france-metropolitaine-entre-1990-et-2018-volume-1-tumeurs-solides-etud

 

Résumé

Rang

Descriptif

Épidémiologie. Connaître l’épidémiologie des tumeurs du rein

6e tumeur solide de l’adulte

En France, il a été relevé en 2018 :

– 15 323 nouveaux cas de cancer du rein

– 5 589 décès par cancer du rein

– un taux de mortalité de 5 pour 100 000 habitants chez l’homme

– un taux de mortalité de 1,5 pour 100 000 habitants chez la femme

– un pic d’incidence entre 60 et 70 ans

Épidémiologie. Connaître les facteurs de risque

Les facteurs de risque de cancer du rein sont :

– le tabac

– l’obésité

– le sexe masculin

– l’hypertension artérielle

– l’insuffisance rénale

– la transplantation rénale

– l’exposition environnementale (trichloréthylène)

– les prédispositions génétiques familiales :

– la maladie de von Hippel-Lindau (gène VHL), qui prédispose aux carcinomes à cellules claires

– le cancer rénal papillaire héréditaire (gène MET), qui prédispose aux carcinomes papillaires

– la léiomyomatose cutanéo-utérine héréditaire (gène FH), qui prédispose aux carcinomes papillaires FH-déficient

– le syndrome de Birt-Hogg-Dubé (gène BHD), qui prédispose aux carcinomes chromophobes

Définition. Connaître les principaux types histologiques des tumeurs

Près de 70 à 80 % des tumeurs du rein sont des tumeurs malignes. Les carcinomes les plus fréquents sont :

– les CRCC (75-85 %)

– les CRTP avec deux sous-types, 1 et 2 (12-14 %)

– les carcinomes chromophobes (4-6 %)

Les deux tumeurs bénignes les plus fréquentes sont :

– l’oncocytome (aussi appelé adénome oncocytaire)

– l’angiomyolipome

Diagnostic positif. Connaître les présentations cliniques des tumeurs du rein

Dans près de 70 % des cas, les tumeurs rénales sont découvertes fortuitement à un stade asymptomatique

Les tumeurs du rein sont symptomatiques dans les cas suivants :

– lorsqu’elles sont volumineuses. Elles peuvent alors être responsables d’une pesanteur lombaire et sont palpées à l’examen clinique (masse lombaire)

– lorsqu’elles envahissent les voies excrétrices. Elles peuvent alors être responsables d’une hématurie microscopique ou macroscopique

– lorsqu’elles sont métastatiques. Elles sont alors associées à une altération de l’état général (asthénie, amaigrissement). Les métastases peuvent également être symptomatiques : dyspnée, douleurs osseuses, troubles neurologiques, etc.

– dans certains cas, elles peuvent être associées à un syndrome paranéoplasique (hypercalcémie, polyglobulie, syndrome inflammatoire, fièvre inexpliquée, etc.)

Examens complémentaires. Connaître les indications des examens complémentaires nécessaires en cas suspicion clinique de tumeur du rein

Devant une tumeur solide du rein, plusieurs situations se présentent :

– il y a une suspicion de tumeur métastatique. Un bilan d’extension (TDM thoracique, scintigraphie osseuse et éventuellement TDM cérébrale) et une anatomopathologie sont indispensables (biopsie ou néphrectomie)

– devant une petite tumeur du rein (< 4 cm), l’exérèse chirurgicale est recommandée et dans certaines situations une biopsie est proposée

– devant une volumineuse tumeur du rein, l’exérèse chirurgicale est proposée en première intention

– dans tous les cas, un scanner thoracique et une évaluation de la fonction rénale par dosage de la créatinémie plasmatique seront proposés

CRCC : carcinome rénal à cellules claires ; CRTP : carcinome rénal tubulopapillaire ; TDM : tomodensitométrie.

 

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