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CHAPITRE 16 Item 310 – Tumeurs de la prostate

I. Définition

II. Épidémiologie

III.  Facteurs de risque

IV. Physiopathologie

V. Diagnostic positif

VI. Stadification du cancer et bilan d’extension

VII. Prise en charge du cancer de la prostate localisé


Situations de départ

Découverte d’une anomalie au toucher rectal

Rétention aiguë d’urine

Hématurie

Incontinence urinaire

Masse pelvienne

Interprétation d’un compte rendu d’anatomopathologie

Tumeurs malignes sur pièce opératoire/biopsie

Découverte d’une anomalie abdominale à l’examen d’imagerie médicale

Découverte d’une anomalie médullaire ou vertébrale à l’examen de l’imagerie médicale

Découverte d’une anomalie osseuse et articulaire à l’examen de l’imagerie médicale

Rédaction de la demande d’un examen d’imagerie

Demande d’un examen d’imagerie

Demande d’explication d’un patient sur le déroulement, les risques et les bénéfices attendus d’un examen d’imagerie

Identifier/reconnaître les différents examens d’imagerie (type/fenêtre/séquences/incidences/injection)

Explication préopératoire et recueil de consentement d’un geste invasif diagnostique ou thérapeutique

Prescription d’une rééducation

Prescrire des antalgiques

Évaluation et prise en charge de la douleur chronique

Consultation de suivi en cancérologie

Prévention/dépistage des cancers de l’adulte

Dépistage et prévention de l’ostéoporose

Annonce d’un diagnostic de maladie grave au patient et/ou à sa famille

Identification, prise en soin et suivi d’un patient en situation palliativeÉvaluation de l’observance thérapeutique

Hiérarchisation des connaissances

Rang

Rubrique

Intitulé

Descriptif

Définition

Connaître les principales lésions bénignes et malignes de la prostate

Hyperplasie prostatique bénigne (adénomyomateuse), adénocarcinome

Épidémiologie

Connaître l’épidémiologie du cancer de la prostate

Connaître la prévalence, les rangs de classement du cancer de la prostate par rapport aux principaux cancers, en termes d’incidence et de mortalité du cancer de la prostate, l’âge de pic de fréquence + les éléments pronostiques

Étiologies

Connaître les principaux facteurs de risque du cancer de la prostate

Savoir citer les facteurs de risque reconnus ; savoir qu’il n’y a pas de chimioprévention dans le cancer de la prostate

Physiopathologie

Connaître le mode d’extension du cancer de la prostate

Connaître les modalités d’extension locale, les principales voies lymphatiques et sites de dissémination métastatique

Diagnostic positif

Connaître les grandes présentations cliniques du cancer de la prostate

Savoir que la plupart des cancers de la prostate sont asymptomatiques ; savoir suspecter un cancer de la prostate à sa forme avancée devant un tableau de rétention urinaire, d’insuffisance rénale, de métastases osseuses diffuses ; savoir que l’hémospermie n’est pas un signe de cancer de la prostate

Examens complémentaires

Connaître les examens paracliniques de première intention devant une suspicion de cancer de la prostate, règles de bon usage du dosage de PSA

Connaître le dosage de PSA et ses règles de bon usage et de pertinence pour le diagnostic individuel précoce

Prise en charge

Connaissances générales sur les différentes prises en charge au stade localisé

Connaître la modalité d’abstention-surveillance chez les patients fragiles, de surveillance active et son rapport bénéfice/risque, de prostatectomie radicale et son rapport bénéfice/risque, de radiothérapie externe et son rapport bénéfice/risque, de prise en charge par curiethérapie interstitielle et son rapport bénéfice/risque, de prise en charge par ultrasons focalisés et photothérapie dynamique

Vignette clinique

Urologue, un patient de 64 ans vous est adressé en consultation pour une élévation du PSA à 7,5 ng/ml. Son précédent PSA, dosé il y a un an, s’élevait à 6,6 ng/ml. Il a pour principaux antécédents une hypertension artérielle essentielle traitée et équilibrée, ainsi qu’une hernie inguinale gauche opérée. À l’anamnèse, le patient est asymptomatique, ne présente pas de signes fonctionnels urinaires et est sexuellement actif sans dysérection. Le toucher rectal que vous pratiquez retrouve un volume prostatique à 40 ml et un nodule en apex gauche. Vous prenez la décision de rechercher un cancer de la prostate par des biopsies, dans le cadre d’une démarche de diagnostic précoce du cancer de la prostate dont vous exposez les principes au patient, ainsi que la balance bénéfice/risque. Avant cet examen, pour affiner la technique de biopsie et permettre de mieux échantillonner d’éventuelles zones suspectes, vous lui prescrivez une IRM multiparamétrique pelvi-prostatique. Celle-ci est cohérente avec votre suspicion clinique, puisqu’une lésion cible de 12 mm hautement suspecte (classée PI-RADS 4/5) est retrouvée en apex gauche.

Dans le cadre du diagnostic précoce du cancer de la prostate, vous expliquez au patient la nécessité de réaliser des biopsies prostatiques, ce qu’il accepte. Celles-ci sont réalisées 3 semaines plus tard. Elles associent 12 carottes systématiques et 2 carottes ciblées en apex gauche. Les résultats anatomopathologiques sont les suivants : adénocarcinome de la prostate, 3 carottes positives, ISUP 1.

Le cas de votre patient est discuté en réunion de concertation pluridisciplinaire. Votre patient est classé à faible risque selon la classification de D’Amico. La stratégie de choix décidée est donc une proposition de surveillance active. Vous expliquez au patient les modalités de cette surveillance, et celui-ci adhère à la proposition.

À 1 an de l’inclusion en surveillance active, le toucher rectal reste inchangé (T1c), le PSA s’élève à 7,7 ng/ml et l’IRM est stable. Aux biopsies de confirmation, vous retrouvez un adénocarcinome de la prostate qui est cette fois-ci reclassifié ISUP 3. Il existe donc une indication formelle à une sortie de surveillance active. Vous discutez des différentes prises en charge thérapeutiques possibles et optez pour une prostatectomie totale. Votre décision est validée en réunion de concertation pluridisciplinaire.

L’intervention a lieu après confirmation d’un bilan d’extension, par scintigraphie osseuse, négatif. Un curage ganglionnaire est réalisé dans le même temps. Les suites opératoires sont simples et le PSA postopératoire est indosable. Les résultats fonctionnels sont satisfaisants avec un maintien de la continence et des érections maintenues à l’aide d’un traitement par injection intracaverneuse de prostaglandine E1 (alprostadil).

I. Définition

 

Le cancer de la prostate est une tumeur maligne qui se développe essentiellement à partir des glandes prostatiques situées dans la zone périphérique de la prostate (fig. 16.1). Sa présentation histologique habituelle est celle d’un adénocarcinome (95 % des cas). Le cancer de la prostate est à distinguer de l’hypertrophie bénigne de la prostate, qui correspond à une hyperplasie glandulaire et stromale au sein de la zone de transition de la prostate. L’hypertrophie de la prostate est une pathologie bénigne pouvant occasionner des symptômes du bas appareil urinaire chez l’homme, mais qui ne constitue en aucun cas une forme précoce du cancer et ne peut évoluer vers une transformation maligne.

D’autres formes histologiques de tumeurs malignes de la prostate ont été rapportées, mais sont rarement rencontrées en pratique : le carcinome neuroendocrine, le lymphome et le sarcome, de même que des métastases d’autres cancers.

Ce texte se base sur les recommandations du sous-comité cancer de la prostate du comité de cancérologie de l’Association française d’urologie.

Fig. 16.1. Anatomie de la prostate.

Source : Atlas d’anatomie générale et radiologique, 2e édition, par J.-P. Dillenseger. Elsevier Masson, 2019.

II. Épidémiologie


Le cancer de la prostate est la tumeur solide la plus fréquente chez l’homme. Selon les données de l’Institut national du cancer, on estime à 50 400 le nombre de nouveaux cas de cancer de la prostate diagnostiqués en France métropolitaine en 2018. Dans les Antilles françaises, l’incidence est deux fois plus élevée qu’en France métropolitaine. L’incidence du cancer de la prostate a connu une forte augmentation depuis les années 1980, en raison de l’effet combiné du vieillissement de la population et de l’amélioration des moyens diagnostiques grâce au dosage sanguin du PSA. Puis, une baisse très nette a été observée en 2011, vraisemblablement du fait d’une utilisation plus « raisonnée » de la démarche de diagnostic précoce du cancer de la prostate (cf. infra). Depuis, l’incidence semble s’être stabilisée. L’âge médian au diagnostic en 2018 était de 68 ans.

Le pronostic du cancer de la prostate s’améliore depuis la fin des années 1990. L’actualisation de la survie nette standardisée sur l’âge rapporte une survie globale à 5 ans de 93 % et à 10 ans de 80 %. En 2018, 8 100 décès ont été enregistrés liés au cancer de la prostate et il se situe donc au troisième rang des décès par cancer chez l’homme. L’âge médian au moment du décès est de 83 ans. La baisse de la mortalité peut être attribuée à deux facteurs principaux. Premièrement, la pratique d’une détection précoce permettant de diagnostiquer les cancers dans leur fenêtre de curabilité. Deuxièmement, l’amélioration de la prise en charge thérapeutique, notamment des formes métastatiques.

III. Facteurs de risque

 

A. Âge

 L’âge est un facteur de risque majeur. L’incidence selon l’âge montre que ce cancer est extrêmement rare chez les moins de 50 ans. L’incidence augmente ensuite rapidement pour atteindre un maximum chez les hommes vers 68 ans et décroître ensuite.

 

B. Origine ethnique

Il a été rapporté une augmentation de l’incidence du cancer de la prostate chez les hommes d’origine antillaise et d’ascendance africaine. Elle serait également associée à un risque de sous-stadification initiale de la tumeur, une agressivité accrue et un risque de récidive tumorale après traitement curatif plus élevé.

C. Facteurs environnementaux

Plusieurs facteurs environnementaux ont été incriminés :

  • l’implication des perturbateurs endocriniens est possible étant donné le rôle fondamental joué par les hormones stéroïdiennes dans la carcinogenèse prostatique. L’exemple historique est celui de la chlordécone, insecticide anciennement utilisé dans les bananeraies aux Antilles, dont l’exposition était associée à une augmentation du risque de cancer de la prostate (l’exposition professionnelle au chlordécone a été reconnue en maladie professionnelle en 2021). Depuis, des études expérimentales ont rapporté un lien entre certains perturbateurs endocriniens et le cancer de la prostate en population générale mais les études ayant obtenu les résultats les plus probants concernent les expositions professionnelles, en particulier dans les milieux agricoles et industriels ;
  • l’obésité et le syndrome métabolique pourraient être associés à un risque plus faible de cancer de la prostate à faible risque, mais à un risque accru de formes à haut risque ;
  • d’autres facteurs ont été évoqués mais ne doivent pas aujourd’hui être considérés comme des facteurs de risque reconnus : traitement androgénique, alcool ou la faible fréquence éjaculatoire.

 

D. Facteurs génétiques

Le cancer de la prostate (CaP) est un cancer où le poids de l’hérédité est prépondérant, les antécédents familiaux représentant le facteur de risque le plus important. Il existe deux types de prédisposition génétique au cancer de la prostate : l’hérédité monogénique, rare (5 % des cas), et l’hérédité polygénique, prédominante (95 % des cas).

Les gènes en cause dans l’hérédité monogénique le plus souvent décrits sont les gènes de réparation de l’ADN (notamment BRCA1, BRCA2, ATM et le gène HOXB13). Les cancers héréditaires monogéniques sont caractérisés par un âge de survenue précoce et une agressivité tumorale accrue.

L’identification précoce d’une forme héréditaire est indispensable car elle pourrait modifier et intensifier la stratégie de détection précoce chez les patients mutés à risque. Les indications devant conduire à une consultation d’oncogénétique sont résumées dans le tableau 16.1. La consultation d’oncogénétique pourra donner lieu à un test génétique de confirmation.

 

Tableau 16.1.  Indication de consultation d’oncogénétique.

Critères évoquant une forme héréditaire de cancer de la prostate

3 cas de cancer de la prostate chez des apparentés de la même branche familiale du premier degré (père, fils ou frères) ou du deuxième degré (neveux, oncles du côté maternel ou paternel)

2 cas de cancer de la prostate, diagnostiqués avant l’âge de 55 ans, chez des apparentés de la même branche familiale du premier degré (père, fils ou frères) ou du deuxième degré (neveux, oncles du côté maternel ou paternel)

Critères évoquant une forme héréditaire BRCA1/BRCA2

Un cas de cancer du sein < 40 ans

Un cas de cancer du sein bilatéral

Un cas de cancer de l’ovaire

Un cas de cancer du sein chez un homme

Autre critère

Une forme précoce de cancer de la prostate avant 50 ans

Source : Recommandations du Comité de Cancérologie de l’Association Française d’Urologie – Actualisation 2022-2024 : Cancer de la prostate – Diagnostic et prise en charge de la maladie localisée.


E. Chimioprévention

Différents agents ont été étudiés : sélénium, vitamine E, aspirine, inhibiteurs de la 5α-réductase (finastéride et dutastéride). Aucune de ces molécules n’a démontré d’effet protecteur significatif sur le risque à long terme de développer un cancer de la prostate cliniquement significatif.


IV. Physiopathologie

 Le cancer de la prostate se développe d’abord localement au sein de la glande prostatique. Deux éléments sont considérés comme importants en termes pronostiques dans l’évolution locale : le franchissement de la capsule prostatique et l’atteinte des vésicules séminales. La tumeur peut ensuite envahir les organes de voisinage (col vésical et abouchement des uretères dans le trigone amenant à une urétérohydronéphrose uni- ou bilatérale ; envahissement de l’urètre prostatique pouvant conduire à une obstruction vésicale), plus rarement envahissement du rectum.

Le cancer de la prostate peut diffuser ensuite :

  • sur le plan lymphatique dans les ganglions de la région ilio-obturatrice, puis iliaque (interne, externe, commune) et enfin, dans la région lomboaortique ;
  • sur le plan hématogène dans les organes à distance. La très grande majorité des métastases sont osseuses. La constatation de métastases viscérales (foie, poumons, etc.) est un critère de mauvais pronostic.


V. Diagnostic positif


A. Dépistage et détection précoce du cancer de la prostate

Le dispositif de dépistage systématique, ou dépistage de masse, est défini comme l’examen systématique des patients asymptomatiques et est généralement à l’initiative des autorités sanitaires. Les objectifs principaux sont une réduction de la mortalité par cancer et le maintien d’une qualité de vie du sujet dépisté. Dans le cas du cancer de la prostate, le dépistage de masse a été associé à une augmentation d’incidence des formes indolentes du cancer et à un risque de surtraitement. Il pourrait exister un bénéfice en termes de diminution de la mortalité par cancer mais ces données restent débattues. Enfin, il n’existe pas de données robustes concernant les conséquences du dépistage sur la qualité de vie des patients. En conséquence, le dépistage du cancer de la prostate comme défini par l’Organisation mondiale de la santé n’est actuellement pas recommandé en France.

En revanche, du fait d’une mortalité élevée, de modalités diagnostiques disponibles et de thérapeutiques curatives validées, l’Association française d’urologie recommande une détection précoce des cancers de la prostate à haut risque. La détection précoce du cancer de la prostate s’envisage à l’échelon individuel, et non à l’échelle de la population. Elle concerne le médecin et son patient, et ne s’intègre pas dans une démarche de santé publique organisée. Elle consiste à rechercher la maladie chez un patient asymptomatique considéré individuellement. La prise en charge diagnostique doit obligatoirement être précédée d’une information sur les facteurs de risque, les bénéfices et les incertitudes de la détection précoce, la pertinence de réaliser une biopsie, le risque de surdiagnostic, et les options de prise en charge thérapeutique. La détection précoce s’adresse aux hommes à partir de 50 ans, dont l’espérance de vie estimée doit être supérieure à 10 ans. En cas de facteurs de risque (origine africaine ou afro-caribéenne, antécédents familiaux de CaP), l’initiation peut se faire à partir de 40 ans. Au-delà de 70 ans, il n’y a pas de données justifiant la poursuite de la détection précoce. La détection annuelle n’est pas recommandée. Un intervalle de 2 ans est actuellement proposé. Les hommes informés éligibles à un diagnostic précoce doivent être évalués par un dosage du PSA total et la réalisation d’un toucher rectal. La stratégie de détection précoce recommandée est résumée dans le tableau 16.2.

 

Tableau 16.2.  Stratégie de détection précoce.

Détection précoce

Modalité

Qui ?

Hommes ayant une survie estimée > 10 ans

Quand ?

De 50 (40 ans en cas de facteurs de risque) à 70 ans

Tous les 2 à 4 ans

Comment ?

Toucher rectal

PSA total

Source : Recommandations AFU.

B. Diagnostic clinique

1. Interrogatoire

La très grande majorité des patients sont asymptomatiques. C’est notamment le cas des patients diagnostiqués dans le cadre d’une démarche de diagnostic individuel précoce.

La recherche de facteurs de risque (antécédents personnels et familiaux [cancers de la prostate, du sein et de l’ovaire]), d’interventions notamment sur la sphère génito-urinaire et de pathologies associées ayant un impact sur la probabilité de survie est importante.

Les symptômes urinaires, s’ils existent, sont le plus souvent les témoins d’une pathologie bénigne associée (hypertrophie bénigne de la prostate, par exemple [chapitre 10]), sans lien direct avec le cancer. Le retentissement de cette pathologie bénigne sera important à évaluer de façon concomitante à la démarche diagnostique et thérapeutique, car elle peut avoir un impact sur la stratégie diagnostique et thérapeutique. Exceptionnellement, les symptômes urinaires peuvent être le signe d’une obstruction de l’urètre prostatique par le cancer de la prostate. Dans ces cas-là, le toucher rectal permettra le plus souvent d’en faire le diagnostic clinique. Le cancer de la prostate n’entraîne pas de symptômes sexuels. En revanche, la démarche diagnostique et thérapeutique peut avoir un impact sur ce plan (hémospermie après biopsies, impuissance ou atrophie des organes génitaux externes après certains traitements) et il est donc important de connaître la fonction sexuelle initiale du patient. Un épisode isolé d’hémospermie ne doit pas être considéré comme un symptôme d’appel du cancer de la prostate et ne nécessite pas d’investigations complémentaires.

Certains symptômes peuvent évoquer la présence de lésions secondaires :

  • altération de l’état général ;
  • anurie par insuffisance rénale obstructive ;
  • symptômes d’anémie par envahissement médullaire métastatique ;
  • douleurs osseuses inflammatoires (prédominance nocturne) pouvant être révélatrices de métastases osseuses ;
  • signes neurologiques (paresthésie, déficit musculaire des membres, voire syndrome de la queue-de-cheval) faisant évoquer une compression médullaire par des métastases rachidiennes.

2. Examen clinique

Le toucher rectal doit être systématiquement expliqué au patient avant sa réalisation et réalisé avant une demande de dosage sanguin du PSA. La plupart des cancers de la prostate sont situés dans la zone périphérique et peuvent être détectés lors de l’examen par toucher rectal. Il recherchera typiquement :

  • un nodule dur (« pierreux »), irrégulier, non douloureux pouvant être limité à un lobe prostatique ou pouvant être plus volumineux ;
  • cet envahissement peut s’étendre à l’ensemble de la prostate, voire aux vésicules séminales ou aux organes de voisinage.

Le toucher rectal peut aussi retrouver des anomalies associées (une hypertrophie bénigne de la prostate, une lésion rectale, etc.) ou, au contraire, être parfaitement normal.

Toute anomalie perçue au toucher rectal faisant suspecter la présence d’un cancer de la prostate doit faire à elle seule discuter la réalisation de biopsies prostatiques échoguidées. Elle justifie une consultation auprès d’un urologue qui confirmera éventuellement l’indication.

Il n’existe le plus souvent pas d’adénopathies satellites palpables dans le cas du cancer de la prostate. Enfin, l’examen clinique peut mettre en évidence des signes cliniques en faveur d’une extension métastatique (par exemple, syndrome de la queue-de-cheval en cas de compression médullaire).

 

C. Diagnostic biologique

1. PSA (prostate-specific antigen)

L’utilisation du PSA comme marqueur sérique a révolutionné le diagnostic du cancer de la prostate. Le PSA est une protéine de la famille des kallikréines jouant un rôle dans la liquéfaction du sperme. Cette protéine est spécifique chez l’homme de l’épithélium prostatique mais pas du cancer de la prostate. La valeur normale du PSA sérique indiquée par les laboratoires peut varier, mais la valeur considérée comme suspecte est supérieure à 4 ng/ml. Le risque de cancer de la prostate augmente avec la valeur du PSA total et un taux supérieur à 20 ng/ml fait suspecter un risque métastatique.

Certaines affections non malignes (hypertrophie bénigne de la prostate, infection urinaire masculine, rétention aiguë d’urine, etc.) ou des manipulations de la prostate (toucher rectal, sondage urinaire, etc.) peuvent augmenter transitoirement le taux sérique du PSA. Dans ce cas, il est recommandé de ne pas doser le PSA dans ces situations aiguës (ex. : infection), ou de le recontrôler à distance de l’événement. Dans tous les cas, en cas de constatation d’un dosage de PSA supérieur à la normale, un dosage de contrôle est recommandé avant de référer le patient à un urologue, étant donné sa variabilité intra-individuelle, de l’ordre de 20 à 30 % de sa valeur.

Enfin, certains traitements médicaux peuvent artificiellement faire baisser le PSA (inhibiteurs de la 5α-réductase, jusqu’à 50 % de sa valeur initiale avant traitement).

2. Dérivés du PSA

L’augmentation de volume prostatique fait augmenter le taux de PSA puisque ce dernier est sécrété par les cellules épithéliales prostatiques. La densité du PSA correspond au rapport entre le PSA sérique total sur le volume prostatique. Un rapport > 0,15 est un argument supplémentaire pour indiquer la réalisation de biopsies prostatiques. Exemple : un taux de PSA de 5 est considéré comme « normal » chez un patient avec une prostate de 50 ml (densité du PSA : 0,10).

Tous les autres dérivés du PSA, ainsi que d’autres tests biologiques dans le sang et/ou les urines, sont en cours d’étude, et ne sont pour l’instant pas recommandés en pratique courante.

 

D. Diagnostic radiologique

L’échographie prostatique par voie abdominale n’a pas d’intérêt diagnostique. Elle surestime souvent le volume prostatique. Les anomalies échographiques sont rarement indicatives d’un cancer de la prostate. Lorsque des anomalies sont signalées (zones hyper- ou hypoéchogènes), elles sont en général observables au toucher rectal et traduisent une tumeur avancée. L’échographie prostatique endorectale a pour seul intérêt de guider la réalisation des biopsies prostatiques (cf. infra). Elle n’est pas recommandée de façon isolée (c’est-à-dire sans biopsies) dans le diagnostic positif ni le bilan d’extension.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) pelvi-prostatique est actuellement recommandée avant la réalisation de toute première série de biopsies prostatiques. Elle est donc indiquée devant toute anomalie du PSA et/ou du toucher rectal. En identifiant des lésions cibles au sein de la glande prostatique, elle permet de guider la réalisation de biopsies ciblées, c’est-à-dire, des biopsies réalisées dans les zones suspectes. Ces biopsies ciblées seront associées aux biopsies standards ou « systématiques » : six carottes biopsiques par lobe prostatique.

Au plan pratique, l’IRM prostatique peut être réalisée sur des machines à 1,5 ou 3 teslas. Elle doit être multiparamétrique, c’est-à-dire associant des séquences morphologiques T2 (axiales et sagittales) et des séquences fonctionnelles de perfusion et de diffusion. Le compte rendu standardisé doit rapporter la mesure du volume prostatique et doit décrire chaque lésion cible (ou suspecte). Le pourcentage de malignité pour chaque lésion décrite à l’IRM est rapporté selon le score Prostate Imaging Reporting and Data System (PI-RADS). Le score est une échelle à cinq points évaluant la probabilité de cancer significatif (tableau 16.3). La réalisation de biopsies ciblées, en complément des biopsies systématiques, est recommandée pour les lésions classées PI-RADS ≥ 3.

 

Tableau 16.3.  Interprétation du score Prostate Imaging Reporting and Data System (PI-RADS).

Échelle

Interprétation

PI-RADS 1

Risque de cancer très faible

PI-RADS 2

Risque de cancer faible

PI-RADS 3

Équivoque

PI-RADS 4

Risque de cancer élevé

PI-RADS 5

Risque de cancer très élevé

Source : Recommandations AFU.

 

E. Diagnostic histologique

Le diagnostic de certitude est établi par la réalisation de ponctions-biopsies prostatiques. La réalisation des biopsies doit obligatoirement être précédée d’une information sur les bénéfices et risques, les incertitudes de la détection précoce, la pertinence de réaliser une biopsie, le risque de surdiagnostic, et les options de prise en charge thérapeutique.

En pratique, les biopsies peuvent se réaliser en consultation ou au bloc opératoire, sous anesthésie locale (bloc périprostatique à la lidocaïne), locorégionale ou générale. Elles sont guidées par une échographie endorectale et se réalisent par voie transrectale ou transpérinéale. Le schéma de biopsie standard comprend 12 carottes dites « systématiques », correspondant à 6 carottes par lobe, auxquelles il est associé des biopsies ciblées en cas de lésion cible identifiée à l’IRM (généralement, 2 carottes supplémentaires par cible).

Les principaux risques de complication après biopsie sont :

  • hémorragiques : hémospermie, hématurie, urétrorragie, rectorragie. Complication la plus fréquente (20-25 %), pouvant durer plusieurs semaines après l’intervention et rarement d’intensité importante. Ce risque est majoré en cas de troubles innés ou acquis de la coagulation par prise d’anticoagulants ou d’antiagrégants plaquettaires ;
  • infectieux : une infection urinaire symptomatique est rare mais grave. Elle nécessite l’introduction d’une antibiothérapie intraveineuse probabiliste à large spectre. Ce risque est majoré en cas d’antécédents de prostatite, prise d’antibiotiques (quelle que soit l’indication) dans les 6 mois précédents, hospitalisation (quelle que soit la raison) dans les 3 derniers mois, vie en institution, présence d’une sonde urinaire ;
  • rétention aiguë d’urine : complication rare (< 1 %).

L’histologie correspond le plus souvent à un adénocarcinome (> 95 % des cas). Les cellules de l’adénocarcinome prostatique ont le phénotype des cellules luminales (p63–/PSA+) des glandes prostatiques. À visée pronostique, le degré de différenciation de la tumeur doit être systématiquement évalué par l’anatomopathologiste et les résultats doivent être communiqués selon le score de l’International Society of Urological Pathology (ISUP) apparu en 2016 (simplification de l’ancien score de Gleason). Le score est codifié de 1 à 5 (tableau 16.4). Le score 1 correspond aux tumeurs les mieux différenciées, le score 5 correspond aux tumeurs les plus agressives. Ce score impacte fortement la prise de décision thérapeutique au stade localisé.

 

 

Tableau 16.4.  Score ISUP 2016.

ISUP 2016

Ancien score de Gleason

ISUP 1

6 (3 + 3)

ISUP 2

7 (3 + 4)

ISUP 3

7 (4 + 3)

ISUP 4

8 (4 + 4 ou 5 + 3 ou 3 + 5)

ISUP 5

9 et 10

Source : Epstein JI, Egevad L, Amin MB, Delahunt B, Srigley JR, Humphrey PA, et al. The 2014 International Society of Urological Pathology (ISUP) Consensus conference on Gleason grading of prostatic carcinoma: definition of grading patterns and proposal for a new grading system. Am J Surg Pathol 2016;40(2): 244-52.

 

VI. Stadification du cancer et bilan d’extension

 

A. Stadification du cancer

La classification de risque la plus connue et utilisée reste la classification de D’Amico (tableau 16.5). Cette classification permet de prédire le risque de récidive biochimique à 10 ans après traitement curateur pour une maladie localisée. Elle repose sur le stade clinique évalué par le toucher rectal, le score ISUP 2016 et la valeur du PSA total sérique.

 

Tableau 16.5.  Classification de D’Amico.

Groupe à risque

Caractéristiques

Faible risque

PSA ≤ 10 ng/ml et score ISUP 1 et tumeur atteignant la moitié d’un lobe ou moins (y compris tumeur non palpable)

Risque intermédiaire

PSA entre 10 et 20 ng/ml ou score ISUP 2 ou 3 ou tumeur atteignant plus de la moitié d’un lobe mais sans atteindre les deux lobes

Risque élevé

PSA > 20 ng/ml ou score ISUP ≥ 4 ou tumeur atteignant les deux lobes

Source : Rozet F, Hennequin C, Beauval JB, et al. Recommandations françaises du Comité de Cancérologie de l’AFU – Actualisation 2018–2020 : cancer de la prostate. Prog Urol 2018; 28: R81-R132.

 

B. Bilan d’extension (tableau 16.6)

Tableau 16.6.  Bilan d’extension du cancer de la prostate.

Groupe à risque

IRM pelvi-prostatique

Scintigraphie osseuse

TDM thoraco-abdomino-pelvienne

Faible risque

Recommandée

Risque intermédiaire

Recommandée

Recommandée

Risque élevé

Recommandée

Recommandée

Recommandée

Source : Recommandations AFU.

1. IRM multiparamétrique

L’IRM multiparamétrique pelvi-prostatique est systématiquement recommandée avant la réalisation des biopsies prostatiques. Dans le cadre du bilan d’extension, elle est utile pour l’évaluation de l’extension locorégionale, en recherchant un envahissement local (vésicules séminales, vessie, rectum) et une extension ganglionnaire pelvienne.

2. Tomoscintigraphie osseuse

La « scintigraphie osseuse » a évolué vers la tomoscintigraphie aux phosphonates marqués au technetium-99m (99mTc) (SPECT ou single-photon emission computed tomography) couplée à un scanner osseux. Elle permet la recherche de métastases osseuses. Elle est indiquée chez les patients ayant un cancer de la prostate de risque intermédiaire et élevé, ou sur point d’appel.

3. Tomodensitométrie (TDM)

La TDM thoraco-abdomino-pelvienne injectée est recommandée dans le cancer de la prostate à haut risque à la recherche de lésions osseuses et viscérales secondaires.

4. Autres examens d’imagerie

La tomographie par émission de positons (TEP) au 18F-choline et plus récemment au PSMA (prostate-specific membrane antigen) serait supérieure en matière de performance à la scintigraphie osseuse combinée au scanner pour la détection des métastases. Leur accessibilité en France devrait se développer dans les années à venir, et la TEP-TDM aux ligands radiomarqués au PSMA devrait devenir l’examen de référence dans le bilan d’extension du cancer de la prostate à haut risque. Ces deux examens ne sont pas pour l’instant recommandés systématiquement dans le bilan d’extension du cancer de la prostate. La TEP-TDM au PSMA est depuis août 2023 autorisée dans le cadre du bilan d’extension du cancer de la prostate. Dans les formes à haut risque a minima et lors des récidives biologiques après traitement du cancer de la prostate localisé, il sera probablement recommandé dans les années à venir.


VII. Prise en charge du cancer de la prostate localisé

 

A. Options thérapeutiques

Elles sont proposées en fonction des recommandations professionnelles et validées par une réunion de concertation pluridisciplinaire. Le choix définitif repose également sur les souhaits du patient, après lui avoir expliqué les bénéfices et risques de chacune de ces options.

1. Abstention-surveillance

Cette modalité de prise en charge est palliative. Elle consiste à ne traiter la maladie que par hormonothérapie (en général seulement en cas d’apparition de symptômes le plus souvent liés à l’évolution locorégionale ou métastatique de la maladie). Elle est généralement réservée aux patients qui ont une probabilité de survie limitée (polypathologies lourdes et menaçantes à court terme).

2. Surveillance active

Contrairement à l’abstention-surveillance, la surveillance active est une modalité de prise en charge curative. Elle vise à retarder le traitement d’une tumeur peu agressive au moment où elle deviendrait agressive tout en restant dans la fenêtre de curabilité de la maladie. Grâce à cela, les effets secondaires du traitement différé seront reportés dans le temps. Par ailleurs, un grand nombre de patients n’aura pas d’indication à un traitement curatif (on estime que moins de 50 % des patients seront finalement traités dans les 10 ans après inclusion dans un protocole de surveillance active). Il s’agit du traitement de référence pour tous les cancers de la prostate localisés à faible risque. Le principe est basé sur le fait que les cancers de la prostate de faible risque ne vont pas progresser ou vont évoluer très lentement. Certains patients vont donc mourir d’une cause intercurrente sans que le cancer de la prostate ait été symptomatique.

Les modalités de surveillance active ne sont pas encore parfaitement standardisées car différents protocoles ont été publiés. Néanmoins, le suivi repose généralement sur un contrôle régulier du PSA (tous les 3 à 6 mois), du toucher rectal (tous les 6 à 12 mois) et de l’IRM prostatique (rythme non encore défini). Une biopsie prostatique dite de confirmation doit être réalisée dans les 6 à 18 mois après l’inclusion en surveillance active. Puis, les biopsies doivent être répétées tous les 3 ans, ou en cas de suspicion clinicobiologique de progression de la maladie. L’arrêt de la surveillance active doit être envisagé en cas d’aggravation d’un des critères de surveillance. Le critère formel est la reclassification de la maladie en ISUP ≥ 2 sur des biopsies de contrôle. Une progression isolée du PSA n’est pas un critère formel d’arrêt de la surveillance active. En cas de traitement définitif indiqué, le choix du traitement doit suivre les recommandations standards selon le groupe à risque (cf. infra).

3. Prostatectomie totale

Modalités

  • Exérèse complète de la prostate et des vésicules séminales, suivie d’une anastomose entre le col de la vessie et l’urètre.
  • Traitement à visée curative.
  • Plusieurs voies chirurgicales peuvent être proposées : voie ouverte, laparoscopique ou laparoscopique robot-assistée.

 

Curage ganglionnaire ilio-obturateur étendu

  • Exérèse bilatérale des ganglions ilio-obturateurs, iliaques internes et iliaques externes jusqu’à la bifurcation iliaque.
  • Intérêt pronostique.
  • Indiqué chez les patients à risque intermédiaire et élevé.

 

Indication

  • Tumeur de risque intermédiaire, en fonction des comorbidités et de l’espérance de vie (> 10 ans).
  • Tumeur à risque élevé, pouvant s’intégrer dans le cadre d’un traitement multimodal (associant radiothérapie et/ou hormonothérapie en adjuvant).

 

Contre-indication

Il n’y a pas de contre-indication de principe à la chirurgie, sauf contre-indication formelle à une anesthésie.

Complications

  • Risque de complications per- et postopératoires (rares) : hémorragie peropératoire amenant à une transfusion, lymphocèle en cas de curage ganglionnaire, plaie rectale, fistule sur l’anastomose entre la vessie et l’urètre, dysurie par sténose de l’anastomose vésico-urétrale, complications de l’anesthésie.
  • Dysfonction érectile : c’est la complication la plus fréquente après prostatectomie (globalement supérieure à 70 %). La récupération d’une fonction érectile spontanée dépend de plusieurs facteurs : qualité des érections avant l’intervention, motivation du patient et conservation des bandelettes neurovasculaires.
  • Incontinence urinaire : fréquente après l’intervention chirurgicale, elle régresse dans la majorité des cas dans les semaines ou les mois qui suivent. Le risque d’incontinence définitive est évalué de 5 à 10 %.
  • Infertilité et anéjaculation : constantes. Bien que la demande soit faible compte tenu de l’âge des patients, le sujet peut nécessiter la proposition d’une conservation de sperme. Il faut par ailleurs rappeler au patient que l’éjaculation est contemporaine de l’orgasme mais n’est pas nécessaire pour l’obtenir (en d’autres termes la capacité d’atteindre l’orgasme peut être préservée chez les patients quelle que soit la modalité thérapeutique).

4. Radiothérapie externe

Modalités

  • Irradiation guidée par l’image de la loge prostatique, dite en modulation d’intensité.
  • Traitement à visée curative.
  • Dose recommandée ≥ 76 Gy.
  • Le nombre de séances est variable selon le protocole choisi et relève des spécialistes.

 

Indication

Irradiation à visée curative :

  • tumeur à risque intermédiaire, en fonction des comorbidités et de l’espérance de vie (> 10 ans). Une hormonothérapie adjuvante de 6 mois est alors recommandée ;
  • tumeur à risque élevé, en fonction des comorbidités et de l’espérance de vie (> 10 ans). Une hormonothérapie adjuvante de 18 mois (minimum) à 36 mois est alors recommandée. Dans certaines formes à très haut risque un blocage avec des hormonothérapies de deuxième génération (acétate d’abiratérone) est maintenant recommandé (surtout si suspicion d’envahissement ganglionnaire pelvien lors du bilan initial).

 

Contre-indication

  • Antécédents d’irradiation pelvienne, maladie inflammatoire rectale active, sclérodermie, impossibilité de maintien de la position (trouble du comportement, attitude vicieuse).
  • La présence de symptômes dysuriques très importants en rapport avec un adénome obstructif de la prostate doit faire discuter un traitement préalable (chirurgie de désobstruction prostatique), généralement 12 semaines avant le début de l’irradiation.

 

Complications

  • Les effets secondaires de la radiothérapie comprennent les risques de sténose de l’urètre, de troubles mictionnels et digestifs, de cystite et de rectite radique (5 à 10 % de toxicité de grade 3).
  • La complication la plus fréquente est le risque de dysfonction érectile (globalement supérieur à 70 %). Ce risque est majoré en cas d’utilisation concomitante d’hormonothérapie.

5. Curiethérapie interstitielle exclusive

Modalités

  • Implantation permanente de grains radioactifs (le plus souvent de l’iode 125) par voie périnéale.
  • Sous contrôle échographique (sonde endorectale).
  • Une seule séance de traitement, sous anesthésie générale ou locorégionale.

 

Indication

Sous-groupe des risques intermédiaires : PSA entre 10 et 15 ng/ml et/ou présence de grade ISUP 2.

 

Contre-indication

  • Antécédents d’irradiation pelvienne, maladie inflammatoire rectale active, sclérodermie.
  • Volume de la prostate supérieur à 60 ml.
  • Présence d’un lobe médian symptomatique.
  • Présence de symptômes urinaires marqués (hyperactivité vésicale et/ou dysurie).
  • Antécédent de résection endo-urétrale de la prostate.

Complications

  • Les effets secondaires sont identiques à ceux de la radiothérapie externe, avec une fréquence des effets secondaires de grade supérieur à 2 plus rare.
  • Intérêt de pouvoir être faite en une seule séance contrairement à la radiothérapie externe.
  • Option thérapeutique standard qui a le plus faible risque d’entraîner une dysérection (< 30 %).

6. Ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU)

Modalités

  • Destruction par ultrasons focalisés du tissu prostatique.
  • Sous contrôle échographique (sonde endorectale).
  • Souvent associée à une résection endo-urétrale de la prostate pour éviter les troubles dysuriques après traitement.
  • Un seul temps de traitement, sous anesthésie.

 

Indication

En cours d’évaluation nationale en traitement de première intention dans des indications voisines de celles de la curiethérapie, plutôt chez des patients de plus de 70 ans ou ayant une contre-indication à la radiothérapie.

 

Complications

Morbidité généralement faible :

  • sténose de l’urètre prostatique ;
  • incontinence urinaire ;
  • dysérection ;
  • fistule prostatorectale exceptionnelle.


7. Hormonothérapie (= suppression androgénique)

Nous présentons ici les modalités de l’hormonothérapie telle qu’elle peut être envisagée en association à la radiothérapie. Les modalités d’usage de ces traitements à la phase métastatique ne seront pas détaillées, de même que les hormonothérapies dites de deuxième génération, qui n’ont pas à ce jour d’indication au stade localisé.

 

Principes généraux

  • Les cellules épithéliales de la glande prostatique normale et le cancer de la prostate sont sensibles aux androgènes.
  • Le retrait des androgènes entraîne une mort cellulaire (apoptose) massive dans la glande normale et dans les cellules cancéreuses. Dans le cas des cellules tumorales, un contingent est capable de survivre (résistance à la castration) et de se développer ultérieurement. Le traitement hormonal seul ralentit donc l’évolution du cancer mais ne peut le guérir ; c’est un traitement palliatif lorsqu’il n’est pas combiné à la radiothérapie.
  • Le traitement hormonal du cancer de la prostate a pour objectif de diminuer la testostérone circulante en deçà d’un seuil fixé à 50 ng/dl. Dans le cas d’un traitement adjuvant à la radiothérapie, l’hormonothérapie sera arrêtée après un délai variable décidé en fonction du groupe à risque (6 mois pour les risques intermédiaires et 18 à 36 mois pour les hauts risques).

 

Castration chirurgicale

Principe d’action : ablation de la pulpe testiculaire (pulpectomie bilatérale). Cette technique de castration est essentiellement utilisée chez les patients métastatiques, chez des patients dont l’observance aux formes injectables peut être remise en cause.

Antagoniste LH-RH

  • Principe d’action : bloque directement les récepteurs hypophysaires de la LH-RH en les inhibant : il n’y a plus de sécrétion de LH ni de FSH. La conséquence est la disparition de la stimulation des cellules de Leydig.
  • Délai avant castration : 48 à 72 heures.
  • Dénomination commune internationale (DCI) de la molécule disponible en France : dégarélix.
  • Injection sous-cutanée mensuelle.

 

Agoniste LH-RH

  • Principe d’action : saturation des récepteurs hypophysaires de la LH-RH qui induit, après une stimulation initiale, un arrêt différé de la stimulation pulsatile et une interruption de la sécrétion de LH et de FSH. La conséquence est la disparition de la stimulation des cellules de Leydig.
  • Délai avant castration : 2 à 4 semaines.
  • DCI des molécules disponibles en France : goséréline, leuproréline, triptoréline.
  • Injection sous-cutanée mensuelle, trimestrielle ou semestrielle.

 

Antiandrogènes non stéroïdiens de première génération

  • Principe d’action : blocage direct du récepteur des androgènes en raison d’une affinité supérieure à celle des androgènes.
  • DCI des molécules disponibles en France : flutamide, nilutamide, bicalutamide.
  • Forme orale quotidienne en une ou plusieurs prises.
  • Indication : prévention du flare up.
  • Principales précautions d’emploi :

–     l’utilisation en monothérapie n’est pas recommandée ;

–     l’utilisation prolongée au-delà d’un mois n’a pas d’intérêt démontré.

 

Principaux effets secondaires induits par la castration de première ligne

Les principaux effets secondaires de la suppression androgénique sont rapportés dans l’encadré 16.1. Même si les effets secondaires sont d’autant plus importants que le traitement est maintenu longtemps, la prescription d’une hormonothérapie expose à un certain nombre de risques dès 6 mois de traitement. Il apparaît donc logique d’appliquer la précaution d’un suivi particulier des patients pour dépister ces complications et les éviter si possible.

Encadré 16.1

Effets secondaires de l’hormonothérapie

  •  Bouffées de chaleur (50 à 80 %).
  • Troubles de l’érection (90 à 95 %).
  • Asthénie.
  • Syndromes anxieux et dépressifs.
  • Altération cognitive.
  • Résistance à l’insuline.
  • Altération du profil lipidique.
  • Risque cardiovasculaire.
  • Ostéopénie et ostéoporose.
  • Sarcopénie et chute.

 

Bilan avant prescription d’une hormonothérapie

Le tableau 16.7 décrit le bilan avant prescription d’une hormonothérapie.

 

Tableau 16.7.  Bilan avant hormonothérapie.

Mode d’investigation

Bilan

Clinique

Interrogatoire sur :

• facteurs de risque cardiovasculaire

• facteurs d’ostéoporose

• facteurs de risque de chute

• troubles de l’humeur

• troubles de la sexualité

Mesure :

• pression artérielle

• poids

• taille

• périmètre abdominal et indice de masse corporelle

Paraclinique

Glycémie à jeun

Bilan lipidique (triglycérides, cholestérol total, HDL-cholestérol, LDL-cholestérol)

Vitamine D

Ostéodensitométrie

Source : Recommandations du CAFU.

B. Stratégie thérapeutique

Elle doit prendre en compte :

  • les caractéristiques du cancer (tableau 16.8) ;
  • les facteurs de morbi-mortalité du patient ;
  • les souhaits du patient.

 

Tableau 16.8.  Stratégie de prise en charge au stade localisé.

 

Surveillance active

Prostatectomie

Radiothérapie externe

Curiethérapie

HIFU

Risque faible

Recommandée

Optionnelle

Optionnelle (sans hormonothérapie associée)

Optionnelle

Expérimentaux

Risque intermédiaire

Optionnelle

Recommandée (± curage)

Recommandée (radiothérapie + hormonothérapie 6 mois)

Optionnelle

Expérimentaux

Risque élevé

Non recommandée

Recommandée (+ curage)

Recommandée (radiothérapie + hormonothérapie 18 à 36 mois)

Non recommandée

Non recommandés

Source : Recommandation AFU.

C. Suivi après traitement

Le suivi après traitement est indispensable pour dépister une récidive précoce. Les modalités de suivi varient selon le traitement local initial. La prise en charge de la récidive est hors programme, mais le diagnostic de récidive doit être connu afin d’adresser rapidement le patient à un urologue pour diagnostiquer et proposer une éventuelle prise en charge au patient (un certain nombre de ces récidives peuvent encore bénéficier d’un traitement curatif).

1. Suivi après prostatectomie radicale

  • Le PSA seul suffit, dosé à intervalle régulier. Le patient est considéré en réponse complète si le PSA est < 0,2 ng/ml 6 semaines après la chirurgie.
  • Un niveau de PSA > 0,2 ng/ml confirmé à une reprise définit une récidive biologique (ou une absence de réponse initiale).

2. Suivi après radiothérapie externe (avec ou sans hormonothérapie adjuvante) et/ou curiethérapie

  • Toucher rectal et PSA nécessaires.
  • Il n’y a pas de seuil de PSA permettant d’affirmer la réponse complète. On appelle le PSA « nadir » la valeur la plus faible de PSA atteinte par le patient. On tolère ensuite de petites variations autour de ce dosage de PSA.
  • La définition de la récidive biologique est différente de celle après la chirurgie. Elle est définie dans ce cas précis par l’augmentation de plus de 2 ng/ml au-dessus du PSA nadir (valeur la plus basse de PSA observée après traitement local). Cette définition suppose donc d’avoir demandé plusieurs dosages successifs de PSA avant d’affirmer la récidive. Il est souhaitable de respecter un délai suffisant entre les dosages de PSA pour observer cette récidive (en général 3 mois, au minimum 1 mois).

 

Pour en savoir plus

 



Recommandations de bonne pratique pour la prise en charge des calculs et de la lithiase urinaires : diagnostic, traitement, suivi et prévention secondaire – Argumentaire. Association française d’urologie (AFU), 2022.

https://www.urofrance.org/recommandation/recommandations-de-bonne-pratique-pour-la-prise-en-charge-des-calculs-et-de-la-lithiase-urinaires-diagnostic-traitement-suivi-et-prevention-secondaire-argumentaire/



Résumé

 

Épidémiologie

>     Cancer le plus fréquent et 3e cause de décès par cancer de l’homme de plus de 50 ans.

>     Diagnostic individuel précoce : après 50 ans en l’absence de facteurs de risque, 45 ans en cas de facteur de risque identifié (familial ou ethnique) ; interrompue au-delà de 75 ans ; si espérance de vie > 10 ans.

 

Diagnostic

>     Anomalies TR : nodule pierreux, blindage pelvien.

>     Biologie : PSA > 4 ng/ml, densité du PSA > 0,15.

>     Imagerie : intérêt de l’IRM de prostate avant réalisation des biopsies.

>     Anatomopathologique :

  • ponction-biopsie de prostate ;
  • adénocarcinome le plus fréquent ;
  • score ISUP de 1 à 5.

 

Classification

>     D’Amico :

  • risque faible : PSA jusqu’à 10 ng/ml et ISUP 1 et tumeur atteignant la moitié d’un lobe ou moins (y compris tumeur non palpable) ;
  • risque intermédiaire : PSA compris entre 10 et 20 ng/ml ou ISUP 2 ou 3 ou tumeur atteignant plus de la moitié d’un lobe mais sans atteindre les deux lobes ;
  • risque élevé : PSA > 20 ng/ml ou ISUP 4 ou 5 ou tumeur atteignant les deux lobes.

 

Bilan extension

Cf. tableau 16.6

Traitements au stade localisé

Cf. tableau 16.8

rs de la prostate résistants à la castration sans métastase.



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