Ajouter à ma sélection Désélectionner

CHAPITRE 13 Item 260 – Hématurie

I. Pour comprendre

II. Examens complémentaires

III.  Étiologies

IV. Situations d’urgence

V. Arbre décisionnel

Situations de départ

Douleur abdominale

Masse abdominale

Anomalie de la miction

Douleur aiguë postopératoire

Douleur de la région lombaire

Hémorragie aiguë

Brûlure mictionnelle

Rétention aiguë d’urine

Douleur pelvienne

Hématurie

Traumatisme abdominopelvien

Demande/prescription raisonnée et choix d’un examen diagnostique

Analyse de bandelette urinaire

Analyse d’un examen cytobactériologique des urines

Anomalie des indices érythrocytaires (Hb, Ht, etc.)

Découverte d’une anomalie abdominale à l’examen d’imagerie médicale

Découverte d’une anomalie pelvienne à l’examen d’imagerie médicale

Rédaction de la demande d’un examen d’imagerie

Demande d’un examen d’imagerie

Demande d’explication d’un patient sur le déroulement, les risques et les bénéfices attendus d’un examen d’imagerie

Explication préopératoire et recueil de consentement d’un geste invasif diagnostique ou thérapeutique

Prévention/dépistage des cancers de l’adulte

Prévention des risques liés au tabac

Hiérarchisation des connaissances

Rang

Rubrique

Intitulé

Définition

Connaître la définition d’une hématurie

Physiopathologie

Connaître les principaux mécanismes des hématuries

Diagnostic positif

Diagnostiquer une hématurie microscopique et une hématurie macroscopique

Diagnostic positif

Connaître la valeur localisatrice d’une hématurie macroscopique

Examens complémentaires

Connaître les principaux examens complémentaires à prescrire devant une hématurie

Contenu multimédia

Exemples typiques de causes fréquentes d’hématurie en imagerie

Contenu multimédia

Photographies d’un exemple typique d’hématurie macroscopique

Contenu multimédia

Photographies d’une bandelette urinaire

Étiologies

Connaître les principales étiologies des hématuries néphrologiques chez l’adulte et l’enfant

Étiologies

Connaître les principales étiologies des hématuries urologiques chez l’adulte et l’enfant

Diagnostic positif

Connaître l’arbre diagnostique des hématuries

Identifier une urgence

Savoir identifier une hématurie macroscopique caillotante et ses signes de gravité

Prise en charge

Connaître les éléments de prise en charge d’une hématurie caillotante

Vignette clinique

Votre confrère gériatre vous demande un avis pour une patiente de 79 ans suivie pour une hyperthyroïdie sans traitement et une fibrillation auriculaire sous apixaban (Eliquis®) et bisoprolol. Elle n’a pas d’antécédent chirurgical ni d’allergie. Il s’agit d’une hôtesse de l’air retraitée, ancienne fumeuse sevrée (30 PA), veuve, avec 2 enfants et qui avoue une consommation alcoolique de vin quotidienne.

Elle a présenté 8 mois plus tôt un premier épisode d’hématurie macroscopique sous apixaban, résolutif après suspension de ce dernier, arrêté spontanément par la patiente elle-même. L’ECBU confirmait la présence de > 10 000 hématies/ml, sans leucocyturie et une culture stérile. La biologie retrouvait une créatininémie à 49 µmol/l, clairance CKD-EPI à 90 ml/min, avec une Hb à 15,6 g/dl et 192 000 plaquettes. La patiente ayant déjà eu par le passé des épisodes d’épistaxis abondantes, votre confrère gériatre avait proposé de diminuer la posologie d’apixaban et lui avait prescrit une échographie rénovésicale.

Il vous l’adresse désormais devant une récidive des hématuries macroscopiques. La patiente vous rapporte que l’échographie prescrite précédemment aurait été normale et elle ne présente actuellement pas de caillots, ni de douleur lombaire ni de fièvre.

Vous lui prescrivez une cytologie urinaire en dehors de l’épisode hématurique, et celle-ci est négative. Vous demandez un uroscanner qui retrouve des polypes vésicaux d’allure non infiltrante, sans lésion du haut appareil urinaire ni dilatation urétéropyélocalicielle malgré la présence de polypes en regard du méat urétéral droit. Vous décidez de confirmer l’aspect endoscopique par une fibroscopie vésicale en consultation qui confirme un tapis polypoïde sur la face latérale droite englobant le méat urétéral droit qui n’est pas vu. Le méat urétéral gauche est sain.

Vous informez la patiente du probable carcinome urothélial et de la nécessité d’une résection endoscopique à visée diagnostique et thérapeutique avec probable endoprothèse urétérale droite transitoire. Vous réalisez la résection endoscopique complète quelques semaines plus tard, après relais anticoagulant et en réséquant le méat droit avec pose d’une sonde urétérale pour 48 heures. Les suites sont marquées par une hématurie caillotante nécessitant un décaillotage endoscopique au bloc opératoire avec coagulation du site de résection, permettant de contrôler la bonne perméabilité des deux méats après test au bleu intraveineux. Dix jours plus tard, la patiente se représente en urgence pour colique néphrétique droite avec hématurie macroscopique à la reprise des anticoagulants curatifs. L’uroscanner est en faveur d’un œdème du méat urétéral droit partiellement obstructif avec caillotage urétéral d’amont. Vous décidez de poser une néphrostomie droite transitoire devant l’évolution septique secondaire avec tableau de pyélonéphrite obstructive sur le caillotage.

L’histologie de la 1re résection est en faveur d’un carcinome urothélial pT1 de haut grade, avec indication de résection de second look avant instillations endovésicales. La veille de la 2e résection, une pyélographie descendante montre un bon passage urétéral droit sans persistance de l’œdème méatique, permettant de retirer la néphrostomie. La résection ne retrouve plus de tumeur macroscopique et le muscle vésical n’est pas infiltré par la tumeur sur le plan histologique.

Les suites opératoires sont simples sur le plan chirurgical mais marquées par un épisode d’aphasie brutale à H3 de la résection de second look, lors de la suspension des anticoagulants pour l’intervention, avec imagerie cérébrale en faveur de multiples AVC ischémiques aigus punctiformes multiterritoriaux sylviens superficiels bilatéraux, en faveur d’une cause cardiaque emboligène. Une prise en charge rapide par antiagrégation et reprise de l’anticoagulation permet une récupération complète de l’aphasie, avec une minime dysarthrie séquellaire.

Vous programmez en accord avec la patiente les 6 instillations adjuvantes de BCG-thérapie intravésicale, après récupération neurologique complète et contrôle échographique sans dilatation rénale ni insuffisance rénale biologique. Vous mettez ensuite en place le suivi cystoscopique, scanographique et les instillations de BCG intravésical de maintenance pour au minimum 18 mois.

I. Pour comprendre

 

A. Définitions

L’hématurie est définie par la présence de plus de 10 hématies/mm3 ou 10 000 hématies/ml émises dans les urines lors d’une miction. Chez la femme, la recherche d’une hématurie doit être réalisée en dehors d’une période menstruelle.

On en distingue deux types : microscopique (fig. 13.1) et macroscopique (fig. 13.2). L’hématurie microscopique est non visible à l’œil nu, il s’agit d’une définition biologique. L’hématurie macroscopique correspond à la coloration rosée, rouge ou brunâtre (vieux sang) des urines.

Fig. 13.1.  Exemple typique d’hématurie macroscopique.

On note la différence de couleur entre la tubulure (rosé clair) et le récipient de vidange (rosé foncé).

Fig. 13.2. Exemple de bandelette urinaire retrouvant une hématurie microscopique.

 

B. Physiopathologie

 Les hématuries micro- et macroscopiques peuvent intervenir dans deux cadres nosologiques :

  • urologique: la présence des hématies dans les urines est liée à une lésion du parenchyme ou de l’arbre urinaire. Celle-ci conduit à l’effraction (micro- ou macroscopique) de vaisseaux sanguins, dont le contenu va se retrouver en contact avec la lumière de la voie excrétrice urinaire → saignement d’origine vasculaire ;
  • néphrologique: l’hématurie est liée au passage des hématies à travers la membrane basale glomérulaire altérée. Les hématuries macroscopiques d’origine néphrologique se présentent sans caillots en raison de l’action fibrinolytique de l’urokinase tubulaire, sans brûlures mictionnelles et sans douleurs → saignement d’origine parenchymateuse le plus souvent glomérulaire .

 

C. Diagnostics positif et différentiels de l’hématurie

1. Diagnostic positif

 Le diagnostic positif d’hématurie repose sur un examen cytologique quantitatif des urines lors d’un examen cytobactériologique des urines (ECBU) : ≥ 10 hématies/mm3. Il existe quatre catégories de diagnostics différentiels (fausse hématurie) :

  • hémorragies de voisinage ;
  • coloration d’origine alimentaire ;
  • colorations liées à une prise médicamenteuse ;
  • origine métabolique.

2. Diagnostics différentiels

  • Hémorragie de voisinage:

–     urétrorragie (persistance d’un saignement en dehors des mictions) ;

–     génitale (menstruations, métrorragies), hémospermie.

  • Coloration d’origine alimentaire: betteraves ++.
  • Coloration liée à une prise médicamenteuse:

–     antibiotiques : rifampicine, érythromycine, métronidazole ;

–     anti-inflammatoires : acide aminosalicylique, salazopyrine, ibuprofène ;

–     vitamine : B12 ;

–     laxatifs contenant de la phénolphtaléine ;

–     contact avec un antiseptique : povidone iodée, eau de Javel.

  • Origine métabolique:

–     hémoglobinurie par hémolyse ;

–     myoglobinurie par rhabdomyolyse ;

–     urobilinurie, porphyrie ;

–     intoxication : plomb, mercure.

 

À retenir

Le diagnostic d’hématurie doit toujours être confirmé par un examen cytologique urinaire quantitatif. Il n’existe pas de corrélation entre le type d’hématurie et la gravité de la maladie causale. La démarche diagnostique est identique pour une hématurie macro- et/ou microscopique persistante.

3. Valeur localisatrice d’une hématurie macroscopique

  •  Une hématurie mascropique d’origine néphrologique est totale, sans douleur, sans caillots, sans brûlures mictionnelles. À distance de l’épisode macroscopique, l’origine néphrologique (souvent glomérulaire) est confirmée par la présence d’une hématurie microscopique à la bandelette urinaire, souvent associée à une protéinurie.
  • Une hématurie macroscopique d’origine urologique peut être isolée ou accompagnée de douleurs, de caillots et/ou de brûlures mictionnelles. Elle est soit :

–     initiale (d’origine urétro-cervico-prostatique) ;

–     terminale (d’origine vésicale) ;

–     totale (totalité de l’arbre urinaire, mais avec une moindre valeur localisatrice, surtout si elle est abondante).

II. Examens complémentaires

 

Ils sont de quatre ordres : biologique, morphologique, endoscopique et anatomopathologique. La pertinence de leur choix sera définie par l’orientation établie à l’issue de la phase clinique.

Les examens complémentaires à réaliser en première intention pour explorer une hématurie sont :

  • l’ECBU avec analyse quantitative et qualitative ;
  • la créatininémie ;
  • la protéinurie des 24 heures ou sur échantillon (rapport protéinurie/créatininurie) ;
  • l’échographie rénovésicale ou réno-vésico-prostatique (homme).

Tous les autres examens (urologiques ou néphrologiques) seront réalisés de manière orientée en fonction des résultats du bilan de première intention et non de manière systématique.

 


A. Biologiques


À visée diagnostique.

1. Examen cytobactériologique des urines

L’ECBU doit comporter :

  • une analyse cytologique quantitative (confirme le diagnostic d’hématurie microscopique) et qualitative à la recherche de cylindres hématiques et d’hématies déformées (ou acanthocytes) orientant vers une néphropathie glomérulaire ;
  • l’analyse bactériologique permettant d’éliminer une infection urinaire.

2. Protéinurie des 24 heures ou sur échantillon

L’existence d’une protéinurie est possiblement liée à la présence de sang en grande quantité dans les urines. Elle doit donc être recherchée en dehors d’un épisode d’hématurie macroscopique. Son taux est évocateur d’une atteinte glomérulaire au-delà de 0,5 g/24 h ou lorsque le rapport protéinurie/créatinurie est supérieur à la normale.

3. Créatininémie

Elle permet la mesure du débit de filtration glomérulaire (DFG). Une altération du DFG oriente vers une origine néphrologique, en l’absence de globe vésical, de caillotage de la voie excrétrice ou d’un autre obstacle bilatéral de la voie excrétrice qui peuvent être responsables d’une insuffisance rénale aiguë obstructive.

4. Numération-formule sanguine

Numération-formule sanguine (NFS) en cas d’hématurie macroscopique abondante ou prolongée pour apprécier son retentissement éventuel.

 

B. Morphologiques

1. Échographie rénovésicale ou réno-vésico-prostatique

C’est l’examen de référence à réaliser en première intention pour rechercher une cause urologique à l’hématurie. Elle permet une exploration morphologique de l’appareil urinaire et une étude vasculaire rénale (écho-Doppler).

L’échographie est de par son innocuité et son accessibilité l’examen morphologique de première intention. Cependant, sa négativité ne dispense pas d’une imagerie plus sensible.

2. Uroscanner

L’uroscanner est un scanner abdominopelvien sans puis avec injection de produit de contraste iodé, couplé à une acquisition au temps excréteur (aussi appelé tardif). Sa sensibilité pour la détection des tumeurs et calculs de petite taille est supérieure à celle de l’échographie. L’acquisition en phase artérielle peut montrer une prise de contraste tissulaire suspecte et également renseigner sur une anomalie des vaisseaux rénaux (notamment en cas de traumatisme). L’uroscanner est un examen de deuxième intention sauf dans le cas particulier du traumatisme où il peut être réalisé d’emblée. Il sera proposé :

  • en cas de négativité de l’échographie si on ne suspecte pas une origine néphrologique ;
  • en complément de l’échographie pour préciser une pathologie du haut appareil urinaire (tumeur rénale ou des voies excrétrices supérieures, calculs, etc.) ou dans le bilan d’extension d’une tumeur de vessie.

En cas de contre-indication, il sera remplacé par une uro-IRM.

3. Autres examens

  • L’abdomen sans préparation (ASP) n’a de place dans le bilan d’hématurie que couplé à l’échographie pour la recherche d’un calcul lors d’une colique néphrétique (mais le couple échographie-ASP peut être remplacé par le scanner faible dose sans injection dans ce contexte).
  • L’artériographie ne sera réalisée qu’en cas de forte suspicion d’atteinte vasculaire, notamment lors d’un traumatisme rénal. Elle aura alors essentiellement pour but d’objectiver un saignement actif afin de l’assécher par une embolisation.

 

C. Endoscopique

1. Urétrocystoscopie

L’urétrocystoscopie est réalisée en consultation, à l’aide d’un cystoscope souple (fibroscopie vésicale), après instillation d’un gel anesthésique local intra-urétral. Elle permet l’exploration de l’urètre, de la paroi vésicale et des méats urétéraux.

La cystoscopie est un examen important du bilan d’hématurie. Elle est réalisée :

  • en cas de suspicion de tumeur vésicale à l’échographie ou au scanner ;
  • en cas d’hématurie isolée avec facteurs de risque : patient de plus de 50 ans, tabac, exposition professionnelle, origine ethnique évocatrice de bilharziose.

2. Urétérorénoscopie

Examen de troisième intention réalisé sous anesthésie générale permettant d’explorer le haut appareil urinaire (uretère et cavités rénales).

 

D. Anatomopathologiques

 

1. Cytologie urinaire

Elle est réalisée idéalement sur les urines du matin ou lors d’un examen endoscopique. C’est un examen anatomopathologique dont l’objectif est de rechercher des cellules atypiques desquamées par l’urothélium. Cet examen est proposé dans les mêmes indications que la cystoscopie, selon les résultats du bilan étiologique de première intention.

Une cytologie urinaire négative ne dispense pas d’un bilan endoscopique.

2. Ponction-biopsie rénale

La biopsie rénale a sa place dans le bilan d’une hématurie en cas de suspicion de néphropathie glomérulaire (hématurie microscopique caractéristique avec acanthocytes ou associée à une protéinurie et/ou une insuffisance rénale et une hypertension artérielle), d’altération récente et rapide de la fonction rénale ou de suspicion de maladie de Berger. Elle permet d’obtenir la confirmation diagnostique et la caractérisation histologique de la néphropathie. Elle sera guidée par l’échographie après vérification du bilan d’hémostase et anesthésie locale.

III. Étiologies

 

L’hématurie micro- ou macroscopique est un symptôme fréquent qui nécessite toujours une enquête étiologique.

Elle peut survenir de manière isolée ou associée à des symptômes qui ont valeur d’orientation étiologique :

  • associée à des troubles mictionnels, des caillots, des douleurs lombaires ou de la fièvre évoquant une pathologie urologique (néoplasique, infectieuse, lithiasique) ;
  • associée à une HTA ou des œdèmes évoquant une pathologie néphrologique.

La démarche diagnostique doit rechercher en première intention les causes les plus fréquentes ou présentant un caractère de gravité :

  • tumeurs urothéliales +++ (vessie, voies excrétrices supérieures), rénales ;
  • infections urinaires ++, lithiases ;
  • néphropathies glomérulaires.

Lors d’une hématurie macroscopique isolée, le bilan doit éliminer une origine urologique avant de s’orienter vers une cause néphrologique.

Un traitement anticoagulant peut favoriser une hématurie mais n’est jamais à considérer comme responsable de première intention. Il ne doit pas dispenser d’un bilan exhaustif.


A. Urologiques

1. Infections urinaires

  • Cause la plus fréquente, elle sera accompagnée d’un tableau clinique évocateur (brûlures mictionnelles, pollakiurie, douleurs lombaires, etc.).
  • Diagnostic confirmé par la réalisation d’un ECBU.
  • Toute atteinte infectieuse de l’appareil urinaire peut entraîner une hématurie : cystite +++, pyélonéphrite, prostatite ++.

2. Tumeurs de l’appareil urinaire

  • Éliminer en première intention une tumeur vésicale ++ (fig. 13.3) avec fréquente hématurie terminale ou totale, et une tumeur rénale (fig. 13.4) réalisant plutôt une hématurie totale.

Fig. 13.3.  Coupe d’un scanner pelvien au temps tardif retrouvant une tumeur vésicale sous la forme d’une lacune de la face postérolatérale gauche de la vessie.

Fig. 13.4.  Coupe d’un scanner abdominal au temps combiné artériel et tardif retrouvant une tumeur développée au niveau de la lèvre antérieure du rein gauche.

La tumeur vient au contact des cavités rénales opacifiées expliquant l’hématurie.

  • Facteurs de risque fréquemment associés : âge ≥ 50 ans, sexe masculin, tabac, exposition professionnelle (amines aromatiques, etc.).
  • Mais toute tumeur de l’appareil urinaire peut causer une hématurie (vessie, reins, voies excrétrices urinaires supérieures, cancer de la prostate avancé, urètre).
  • Bilan : cystoscopie, cytologie urinaire et uroscanner.

3. Maladie lithiasique (calculs urinaires) (fig. 13.5)

  • Concerne 5 à 15 % de la population des pays industrialisés.
  • Peut être paucisymptomatique, révélée par un épisode de colique néphrétique ou par des troubles mictionnels en cas de calcul de l’uretère pelvien, ou d’hématurie lors d’effort et au sport (calculs rénaux mobiles).
  • Intérêt du scanner abdominopelvien sans injection (ou du couple ASP + échographie) lors d’un épisode douloureux ou de l’uroscanner en dehors d’une phase aiguë.

Fig. 13.5.  Coupe d’un scanner abdominal sans injection de produit de contraste retrouvant un calcul centimétrique du pyélon gauche.

4. Traumatiques

  • Contexte évident.
  • L’hématurie peut être liée à une fracture du parenchyme rénal, une atteinte du pédicule vasculaire ou encore une plaie vésicale.
  • La stabilité hémodynamique orientera le choix de l’examen : uroscanner ± artériographie en cas d’atteinte du pédicule rénal, échographie si patient instable.

5. Prostatiques

  • Hématurie macroscopique initiale ou totale en cas de saignement abondant.
  • Signe rarement révélateur de cancer de la prostate, elle est plus souvent associée à une prostatite ou une hypertrophie et reste un diagnostic d’élimination.

 

B. Néphrologiques

1. Néphropathies glomérulaires

Le syndrome glomérulaire associe une protéinurie et/ou une hématurie ± HTA, œdèmes et insuffisance rénale aiguë ou chronique. L’ECBU met en évidence des hématies déformées et des cylindres hématiques (ou acanthocytes).

Les principales causes d’hématurie d’origine glomérulaire sont les suivantes :

  • glomérulonéphrite à dépôts mésangiaux d’IgA (maladie de Berger) :

–     cause la plus fréquente des hématuries macroscopiques glomérulaires récidivantes, préférentiellement chez les hommes jeunes, en post-infection virale,

–     la biopsie confirme le diagnostic en mettant en évidence la présence de dépôts mésangiaux granuleux d’IgA et une prolifération endocapillaire,

–     diagnostic différentiel : syndrome d’Alport. Pathologie héréditaire associant hématurie macroscopique récidivante, surdité bilatérale et atteinte ophtalmologique ;

  • glomérulonéphrite rapidement progressive (GNRP) :

–     marquée par une dégradation de la fonction rénale en quelques semaines,

–     associée à une maladie systémique (syndrome de Goodpasture, lupus, maladie de Wegener, etc.),

–     diagnostic par ponction-biopsie rénale ++ ;

  • glomérulonéphrite aiguë post-infectieuse :

–     secondaire à une infection oto-rhino-laryngologique (ORL) – le plus souvent – à streptocoque,

–     le tableau clinique révélateur est bruyant, sous la forme d’un syndrome néphritique.

2. Néphropathie interstitielle aiguë médicamenteuse

  • Son mécanisme est immunoallergique.
  • Elle peut être associée à d’autres signes allergiques (rash cutané, cytolyse hépatique, etc.).
  • Lors d’une prise médicamenteuse : sulfamides, pénicillines, etc.

 

C. Hématurie microscopique isolée

Il s’agit d’une situation fréquente où l’interrogatoire et le bilan étiologique de première intention ne permettent pas d’orienter vers une cause (absence de symptomatologie associée urologique ou néphrologique, absence de protéinurie ou d’insuffisance rénale, échographie de l’appareil urinaire normale).

Dans cette situation, le bilan doit systématiquement être complété par les investigations urologiques suivantes, à la recherche en particulier d’une tumeur de l’appareil urinaire :

  • cytologie urinaire ;
  • uroscanner ;
  • cystoscopie.

En cas de négativité, une surveillance simple uronéphrologique est discutée dont le rythme et les principes ne sont pas clairement définis dans les recommandations. La surveillance sera d’autant plus recommandée qu’il existe des facteurs de risque de tumeur urothéliale.

IV. Situations d’urgence

 

A. Déglobulisation aiguë

Comme dans toute situation de saignement actif, il est indispensable de rechercher des signes d’anémie aiguë ou chronique (pâleur cutanéomuqueuse et manifestations fonctionnelles anoxiques type asthénie, dyspnée, etc.) et d’évaluer le retentissement hémodynamique éventuel (tachycardie, hypotension artérielle, marbrures, etc.).

Une NFS doit systématiquement être réalisée devant une hématurie macroscopique prolongée ou abondante.

 

B. Caillotage

1. Diagnostic

Le caillotage vésical ou de la voie excrétrice est une urgence thérapeutique en raison du risque de rétention aiguë d’urine et d’insuffisance rénale aiguë obstructive (blocage par les caillots qui s’accumulent).

En conséquence, la présence de caillots doit systématiquement être recherchée à l’interrogatoire et l’examen clinique :

  • visualisation directe des caillots par le patient ou le soignant (demander au patient de garder ses urines) ;
  • sensation de blocage lors du passage des urines ;
  • recherche d’un globe vésical (les urines sont « bloquées » par l’accumulation des caillots dans la vessie) ;
  • douleurs lombaires pouvant orienter vers un caillotage de la voie excrétrice supérieure.

2. Prise en charge

En cas d’hématurie macroscopique importante avec caillotage vésical et/ou rétention aiguë d’urine :

  • mise en place d’une sonde vésicale double courant ;
  • réalisation d’un ECBU lors de la pose de la sonde ;
  • décaillotage manuel à la seringue ;
  • pose d’une irrigation vésicale en continu dont le débit sera adapté à la couleur des urines ;
  • surveillance des volumes d’entrée/sortie.

L’hématurie macroscopique caillotante est une contre-indication au cathéter sus-pubien en raison de la possible tumeur de vessie sous-jacente et de son inefficacité pour réaliser des lavages efficaces compte tenu de son faible diamètre.

En cas d’hématurie d’origine urologique du haut appareil urinaire (tumeurs du rein et de la voie excrétrice supérieure +++), un caillotage de la voie excrétrice peut survenir entraînant une dilatation des cavités rénales et des douleurs lombaires. Un drainage des cavités rénales par sonde JJ ou sonde urétérale peut être proposé selon l’évolution de la symptomatologie.

V. Arbre décisionnel (fig. 13.6)

 

Fig. 13.6. Arbre décisionnel : hématurie.

CPC : cavité pyélocalicielle ; IU : infection urinaire.


Résumé

Rang

Descriptif

Connaître la définition d’une hématurie : présence de plus de 10 hématies/mm3 ou 10 000 hématies/ml émises dans les urines lors d’une miction

Connaître les principaux mécanismes des hématuries :

– urologique : lésion du parenchyme rénal ou de l’arbre urinaire → saignement d’origine vasculaire

– néphrologique : passage des hématies à travers la membrane basale glomérulaire altérée → saignement d’origine parenchymateuse le plus souvent glomérulaire

Diagnostiquer une hématurie microscopique et une hématurie macroscopique

Microscopique : définition biologique

Macroscopique : visible à l’œil nu (coloration rosée, rouge ou brunâtre)

À confirmer par examen cytologique quantitatif ++ après avoir éliminé les diagnostics différentiels (hémorragie de voisinage, coloration alimentaire ou médicamenteuse, causes métaboliques)

Connaître la valeur localisatrice d’une hématurie macroscopique :

– initiale : urétroprostatique

– terminale : vésicale

– totale : toujours le cas si d’origine rénale ; pas de valeur localisatrice en cas d’hématurie abondante

Connaître les principaux examens complémentaires à prescrire devant une hématurie :

– 1re intention : ECBU, créatinine, protéinurie des 24 h (si microscopique) et échographie de l’appareil urinaire ; NFS si macroscopique

– en 2e intention et selon signes d’appel : uroscanner, endoscopie de l’appareil urinaire, cytologie urinaire et ponction-biopsie rénale

Connaître les indications d’examen d’imagerie devant une hématurie chez l’adulte et l’enfant

Première intention : échographie de l’appareil urinaire

Uroscanner en cas de négativité de l’échographie et en l’absence d’orientation vers une origine néphrologique ou en complément de l’échographie selon la pathologie urologique retrouvée

ASP couplé à l’échographie seulement en cas d’orientation vers une origine lithiasique

Principales étiologies des hématuries néphrologiques chez l’adulte et l’enfant :

– néphropathies glomérulaires +++ : maladie de Berger, glomérulonéphrite aiguë post-infectieuse, GNRP, syndrome d’Alport

– néphropathie interstitielle aiguë médicamenteuse

Principales étiologies des hématuries urologiques chez l’adulte et l’enfant :

– infections urinaires +++

– tumorale : urothéliale ++ mais tous les cancers de l’appareil urinaire peuvent entraîner une hématurie (rein, uretère, vessie, prostate, urètre)

– calcul : un calcul peut faire saigner où qu’il soit dans l’appareil urinaire et n’entraîne pas forcément d’autres symptômes

– HBP (diagnostic d’élimination)

– traumatique (contexte évident)

Savoir identifier une hématurie macroscopique caillotante et ses signes de gravité

À suspecter devant une sensation de blocage transitoire à la miction ou devant l’association hématurie + rétention (les caillots bloquent l’évacuation des urines). Devant un caillotage, évaluer le retentissement hémodynamique, faire une NFS en urgence et rechercher un globe vésical. Attention au caillotage de la voie excrétrice supérieure sur une lésion du haut appareil → douleur lombaire unilatérale du côté de la lésion

Connaître les éléments de prise en charge d’une hématurie caillotante :

– voie veineuse périphérique

– sondage vésical

– décaillotage à la seringue puis mise en place d’une irrigation vésicale

– surveillance bilan « entrées/sorties »

Contre-indication : cathéter sus-pubien ++

ASP : abdomen sans préparation ; ECBU : examen cytobactériologique des urines ; GNRP : glomérulonéphrite rapidement progressive ; HBP : hypertrophie bénigne de la prostate ; NFS : numération-formule sanguine.

 

PROPRIETE INTELLECTUELLE
La structure du Site ainsi que l’ensemble des contenus diffusés sur le Site sont protégés par la législation relative à la propriété intellectuelle.

Les photographies, illustrations, dessins ou tout autre graphique, documents, les signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature figurant sur le Site (ci-après « les Contenus ») ne peuvent faire l’objet d’aucune reproduction ou représentation sans l’autorisation préalable expresse et écrite de L’AFU.

POLITIQUE FOUILLE DE TEXTES ET DE DONNEES

L’AFU s’oppose à toutes opérations de moissonnage et de fouille de textes et de données au sens de l’article L. 122-5-3 du code de la propriété intellectuelle.

Cette opposition couvre l’ensemble du Site et des Contenus auxquels il donne accès.

Toutes opérations de moissonnage et de fouille de textes et de données visant le Site et ses Contenus, y compris par des dispositifs de collecte automatisée de données constituent donc des actes de contrefaçon sauf obtention d’un accord spécifique formellement exprimé de L’AFU.

Continuer votre lecture

Contenu protégé