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CHIRURGIE DU CANCER DE LA PROSTATE : Ultrasons de haute fréquence (HIFU) dans le traitement du cancer de la prostate

Auteurs : Xavier REBILLARD, Alain RUFFION Référence : Prog Urol, 2005, 1131 Mots clés : Cancer de prostate, Chirurgie, HIFU

L’Ablatherm® utilise la technique des ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU : High Intensity Focused Ultrasound) qui consiste à obtenir une nécrose tissulaire en délivrant un faisceau d’ultrasons focalisé par salves. Les faisceaux d’ultrasons sont produits par un transducteur piézo-électrique. La destruction tissulaire dans la zone cible est due à 3 phénomènes :

• une nécrose de coagulation liée à l’hyperthermie soudaine (entre 85 et 100 degrés C).

• un phénomène de cavitation par mise en vibration des microbulles de gaz dissoutes dans les tissus par les impulsions ultrasonores successives.

• une élévation thermique qui se produit progressivement au sein du volume cible par la sommation des tirs dans le temps et l’espace.

I. Indications de l’Ablatherm®

• Le traitement en première intention d’un cancer de la prostate localisé est proposé à des patients

– âgés de plus de 70 ans,

– dont l’espérance de vie est au moins de 7 ans (ou à des patients plus jeunes lorsque existent des co-morbidités compétitives).

– Présentant une tumeur de stade clinique T2,

– avec une valeur de PSA < 15 ng/ml

– un score de Gleason 7 (3+4).

– Volume prostatique inférieur à 50 cc

– Volume tumoral limité (moins de 4 zones prostatiques atteints sur les 6 classiques).

• Le traitement de rattrapage par HIFU d’un échec de radiothérapie externe est résevé aux patients traités initialement par radiothérapie en intention curative pour une tumeur T1­T2, dont la récidive est prouvée histologiquement par biopsie et l’absence de métastases ou d’extension ganglionnaire vérifiée par scanner thoraco-abdomino-pelvien et scintigraphie osseuse.

II. Réalisation technique de l’Ablatherm®

L’application des ultrasons est réalisée par voie transrectale, sous contrôle échographique. Le traitement est le plus souvent effectué sous anesthésie générale ou rachianesthésie, après réalisation d’une résection transuréthrale de la prostate pour réduire le volume prostatique en dessous de 30 cc et diminuer le risque de rétention urinaire post-opératoire [14, 15, 52].

La stratégie de traitement, en cas de traitement de première intention et non préservation des nerfs érecteurs, est schématisée ci dessous. L’objectif est de traiter 140 à 150 % du volume initial mesuré.

Cette stratégie n’est pas retenue pour les retraitements (échec après séance initiale HIFU) ou les traitements après échec de radiothérapie pour lesquels les zones successives sont simplement juxtaposées sans superposition.

 

III. Résultats de l’Ablatherm®

Le suivi est effectué par le dosage du PSA et éventuellement des biopsies de contrôles. Le nadir est obtenu entre 3 et 5 mois après le traitement. En fonction post opératoire du bilan à 3 mois, une biopsie de prostate peut être proposée en cas de PSA > 0,5 à 1 ng/ml et une seconde séance de traitement décidée si la biopsie est positive. Les biopsies montrent des lésions nécrotiques de coagulation pendant les 3 mois qui suivent le traitement par Ablatherm®, puis la fibrose apparaît progressivement.

Les équipes françaises et allemandes ont publié les résultats de leurs étapes successives dans le traitement par Ablatherm du cancer de prostate localisé.

L’étude de Gelet (2003) [8] concerne 242 patients, d’âge moyen 71 ans, traités entre 1993 et 2002 avec un suivi minimum d’un an (suivi moyen : 29 + 21 mois). Les patients, stratifiés en fonction de leur risque pronostique (25,6% risque faible, 44,6% intermédiaire, 29,8% risque élevé de récidive), présentaient une lésion localisée (48,8% T1, 47,5% T2 et 3,7% T3) avec un PSA < 30 ng/ml (PSA moyen : 9,22 + 5,76 ng/ml et une différenciation cellulaire faible chez 12,8% (score de Gleason >7). Les critères d’échec pour le calcul de la survie sans progression étaient une biopsie positive quelle que soit la valeur du PSA ou 3 élévations consécutives de PSA avec une vélocité du PSA > 0,75.

Le nadir médian de PSA est de 0,16 ng/ml ; 72,7% des patients ont un nadir de PSA< 0,5 ng/ml ; 81,8% des biopsies étaient négatives après traitement. Le taux actuariel de biopsies négatives à 5 ans est de 74% (respectivement 82%, 71% et 48% pour les Gleason 2 à 6, 7 et >7). La survie sans récidive à 5 ans est de 63% (risque faible : 78%, risque intermédiaire : 61%, et haut risque : 47%). Après diagnostic d’un échec thérapeutique 16,5% des patients ont reçu un traitement adjuvant (moitié radiothérapie, moitié hormonothérapie) alors que 7% ont continué à être simplement surveillés en raison d’une valeur de PSA basse avec faible vélocité. Le taux actuariel de patients sans traitement adjuvant à 5 ans est de 72 % (risque faible: 94%, risque intermédiaire: 62%, et haut risque: 65%, p<0,05).

L’Etude Multicentrique Européenne présente les résultats préliminaires de 402 patients présentant une lésion localisée (T1-2 N0-x M0) sur les 559 patients traités entre novembre 1995 et novembre 1999. Après traitement, 87,2% des patients évaluables pour la biopsie de prostate présentent des biopsies négatives ; 92,1 % des biopsies sont négatives chez les patients présentant des facteurs de risque faibles, 86,4% dans le groupe de risque intermédiaire et 82,1 % dans le groupe de risque élevé. Le résultat des biopsies est conditionné par le nombre de biopsies positives au diagnostic. Le nadir du PSA était obtenu 3 à 4 mois après le traitement HIFU. Le nadir de PSA moyen à 1.8 ng/ml (0-27 ng/ml) était jugé relativement élevé, lié aux non-répondeurs (médiane : 0,6 ng :ml). La valeur du PSA post HIFU est influencée significativement par le volume prostatique, le traitement de la totalité de la prostate. Il n’est pas noté de facteurs significatifs selon les groupes pronostiques. La stabilité de la valeur du PSA ou les critères de l’ASTRO n’ont pas été étudiés du fait du faible recul de certains patients.

Blana a rapporté les résultats concernant 146 patients traités par HIFU pour un cancer localisé de la prostate avec un PSA 15 ng/ml, et un score de Gleason 7, avec un suivi moyen de 22,5 mois (4 à 62 mois). Après traitement, 93.4% des patients ont obtenu des biopsies négatives. Le nadir de PSA médian état à 0.07 ng/ml, et la valeur du PSA s’est maintenue inférieure à 0.15 ng/ml après un suivi moyen de 22 mois. Bien qu’un taux de succès important ait été obtenu chez les patients à risque faible ou intermédiaire, un traitement combiné doit être envisagé chez les patients à haut risque (critères de D’Amico).

Aucune incontinence grade II-III n’est apparue. 12 % des patients ont subi une résection de prostate pour obstruction pendant le suivi. La fonction sexuelle était préservée chez 47.3% des patients et il n’était pas observé de modifications du score IPSS. Les résultats à 5 ans sont comparables à ceux rapportés pour les traitements de référence du cancer de la prostate localisé.

Au total, les résultats publiés à moyen terme (5 ans) montrent que l’efficacité de ce traitement est comparable aux autres options thérapeutiques. Cependant, du fait de l’histoire naturelle du cancer de la prostate et du recul limité des essais cliniques, il est encore impossible de parler d’équivalence avec les autres techniques (qui bénéficient d’un recul de quinze ans).

IV. Complications de l’Ablatherm®

La complication principale du traitement par Ablatherm était la rétention urinaire. Une résection trans-urétrale de prostate est désormais généralement pratiquée au préalable et autorise une durée moyenne de sondage de 2 jours. Les taux d’incontinence restent faibles : grade I (4­6%) ou grade II (0­2%) et les scléroses du col retrouvées dans 5 à 10% des cas. Les fistules prostato-rectales sont désormais exceptionnelles grâce au respect de contre indications sur l’épaisseur de la paroi rectale 6 mm et des anomalies anatomiques.

La préservation – ou non – de l’érection est liée au positionnement de tirs au niveau de la face des faces latérales de la prostate. Une préservation doit être discutée préalablement avec le patient. Elle est associée à un taux de retraitement plus élevé.

V. Conclusion

Les avantages principaux du traitement par HIFU restent sa faible morbidité et la possibilité de traitement itératif, la possibilité de traiter en cas d’antécédent de résection, le contrôle local précoce vérifié par des biopsies et la possibilité, en cas d’échec, d’un traitement de seconde ligne par radiothérapie éventuellement, sans augmenter les complications. Les derniers résultats, obtenus en chevauchant les zones successives de traitement (150% du volume prostatique traité) sont identiques à ceux des traitements de référence.

Références

1. BLANA A., WALTER B., ROGENHOFER S., WIELAND W.. High-intensity focused ultrasound for the treatment of localized prostate cancer: 5-year experience. Urology 2004;297-300.

2. CHAUSSY C., THUROFF, RÉBILLARD X., GELET A.. High Intensity Focused Ultrasound for Urologic Cancers. Nature Clinical Practice Urology 2005 : 2 (4) 191-198

3. COLOMBEL M., GELET A.. Principles and results of high-intensity focused ultrasound for localized prostate cancer. Prostate Cancer Prostatic Dis. 2004;7(4):289-94..

4. GELET A., CHAPELON J.Y., BOUVIER R., PANGAUD C., LASNE Y.. Local control of prostate cancer by transrectal high intensity focused ultrasound therapy: preliminary results. J Urol 1999;161:156-162.

5. REBILLARD X., GELET A., DAVIN J.L., SOULIE M., PRAPOTNICH D., CATHELINEAU X., ROZET F., VALLANCIEN.. Transrectal high-intensity focused ultrasound in the treatment of localized prostate cancer. J Endourol. 2005 ;19(6):693-701.

6. REBILLARD X., SOULIE M., DAVIN J.L. et CCAFU. Traitement par HIFU du cancer de la prostate : revue de la littérature et indications de traitement. Progrès en Urologie (2003), 13, 1428-1457

7. SOULIE M., BARRE C., BEUZEBOC P., CHAUTARD D., CORNUD F., ESCHWEGE P., FONTAINE E., MOLINIE V., MOREAU J.L., PENEAU M., RAVERY V., REBILLARD X., RICHAUD P., RUFFION A., SALOMON L., STAERMAN F., VILLERS A.. Recommandations CCAFU 2004 cancer de la prostate. Progrès en Urologie 2004, 14, 913-955

8. THÜROFF S., CHAUSSY C., VALLANCIEN G., WIELAND W., KIEL H.J., LE DUC A., DESGRANDSCHAMPS F., DE LA ROSETTE J.J.M.C.H., GELET A.. High-intensity focused ultrasound and localized prostate cancer: efficacy from the European multicentric study. J Endourol 2003;17:673-677.

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