Les promesses de l’Intelligence Artificielle en santé
Cédric Villani, mathématicien, membre de l’Académie des Sciences et député LRM de l’Essonne s’est vu confier par le Premier Ministre, Edouard Philippe, une mission sur l’Intelligence Artificielle (IA). Le 28 mars dernier, Cédric Villani a remis au gouvernement son rapport qui, sans concession, pose les bases d’une stratégie nationale de développement de l’IA en France. Le monde de la santé est largement concerné.
Premier constat, les deux tiers des français ne savent pas ce qu’est l’Intelligence Artificielle et en seraient même effrayés. A quoi sert-elle, où nous conduit-elle, les machines remplaceront-elles l’homme, les programmes informatiques rivaliseront-ils avec le cerveau humain ? Les interrogations sont pléthore et l’inconnue inquiète. Mais il est grand temps pour l’Hexagone d’investir sérieusement dans cette industrie aujourd’hui quasi exclusivement aux mains des chinois et des américains. Le rapport Villani recense 135 propositions destinées à rattraper le retard français et à replacer le pays dans la compétition en bloquant la fuite des cerveaux.
Santé et IA
Dans le domaine de la santé, l’Intelligence Artificielle va contribuer à une amélioration de la qualité des soins et très certainement à une réduction des coûts grâce à une prise en charge plus personnalisée des patients, un meilleur accès aux soins et une meilleure traçabilité des données, promet le rapport Villani. Les programmes d’IA actuellement en développement visent la construction d’un processus diagnostic individualisé et d’une thérapeutique adaptée à chaque patient. Avec la captation d’une masse importante de données, l’objectif est de mieux détecter les symptômes et de prédire l’évolution de la maladie. Il s’agira en effet de croiser et d’exploiter les résultats d’une multitude d’explorations médicales, biologiques ou d’imagerie, mais également des informations aujourd’hui peu utilisées comme les habitudes de vie, le contexte social, familial ou professionnel du patient. Avec le croisement de quantités massives de données, la médecine sera tout à la fois personnalisée et prédictive avec un suivi en temps réel du patient. Le recueil des symptômes par exemple, se verra facilité par l’utilisation de capteurs intégrés à l’individu comme les Apps de santé et les objets connectés (objets médicaux dits intelligents). Les effets indésirables liés à certains traitements seront mieux connus, répertoriés et donc pris en charge. Enfin, prédire les épidémies et les contenir sera dans le champ des possibles. La recherche médicale devrait ainsi progresser plus rapidement tout comme l’innovation thérapeutique.
Les professionnels en première ligne
L’exercice quotidien de la médecine va être considérablement impacté par l’interaction nécessaire entre l’expertise humaine et les apports de l’IA. Ainsi, l’Intelligence Artificielle en santé ne sera rien sans les professionnels qui la feront vivre. Ils joueront un rôle fondamental dans son développement. La capacité d’adaptation des équipes aux nouvelles technologies liées à l’utilisation de l’IA et la maîtrise des compétences qu’elle induit ne sera pas une option. D’où l’apparition d’un enjeu majeur : celui de la formation des étudiants en médecine ainsi que de l’ensemble des professionnels de la santé. L’émergence de l’IA s’accompagnera très certainement d’une réorganisation des professions. La sécurité médico-légale des données de santé et la responsabilité des professionnels sont déjà au cur des préoccupations. Qui sera tenu pour responsable en cas d’erreur ? Le programme, l’algorithme, la machine, le robot ou le médecin ? Du fait d’une possible analyse prédictive de la demande de soin par un traitement efficace de la masse des données emmagasinées, c’est tout notre système de santé qui subira de profondes modifications. Quant au Dossier Médical Personnel (DMP), futur espace sécurisé des données de chaque individu, il sera enrichi au fil des ans de toutes les informations relatives à chacun. Des données qui pourront être partagées par les professionnels et récupérées par les patients eux-mêmes. Mais cela implique une condition majeure : que la France se dote de nouvelles infrastructures d’information telle qu’une plateforme de mutualisation des données de santé hautement sécurisée et adaptée aux usages liés à l’IA afin d’éviter tout risque de fuite. Soyons-en assurés : bientôt les machines répondront à la place de l’homme, mais pas sans l’homme.