Cancers et demandes spécifiques de prise en charge des troubles sexuels : réalités de terrain à propos de deux enquêtes prospectives dans un hôpital général
Objectifs.– La demande de prise en charge des troubles sexuels liés au cancer ou à ses traitements est fréquente mais souvent mal connue. Lors de la mise en place d’une consultation dédiée d’oncosexologie, 2 analyses prospectives (quantitative et qualitative) ont été faites dans 2 populations successives (a : cancer non sélectionné [NS], b : cancer prostate exclusivement [CP]) d’hommes consultants en urologie atteints de cancer (quel que soit stade, traitement, suivi) pour mieux préciser la demande et les besoins oncosexologiques.
Méthodes.– Groupe NS : analyse des seules demandes suivies d’une prise en charge pour troubles sexuels chez 744 consultants consécutifs dont 305 avec cancer. Quatre paramètres évalués : (a) troubles sexuels concernés, (b) cancers impliqués, (c) prise en charge, (d) médecin adresseur. Groupe CP : analyse systématique de : (a) capacité érectile (Hardness score), (b) demande éventuelle de traitement, (c) avis sur bien fondé de l’enquête, chez 123 consultants consécutifs (âge moyen : 71,6) (35 prostatectomie radicale, 31 hormonothérapie intermittente ou non, 26 surveillance, 19 radiothérapie, 9 HIFU, 3 en attente de traitement).
Résultat.– Groupe NS : troubles sexuels = 61 (56 dysfonction érectile [DE], 2 baisse désir, 1 dyséjaculation, 1 dysorgasmie, 1 infertilité) ; cancer concerné : (a) 57 urologiques : 49 CP traités surtout par chirurgie (27) et radiothérapie (11), 5 cancers de vessie, 1 cancer du rein, 1 cancer du testicule (infertilité) et 1 cancer de verge ; (b) 4 non urologiques ; traitement : inhibiteur PDE5 (iPDE5) (28) et injection intracaverneuse (IIC) (23) loin devant associations (5) et autres traitements (5) ; médecin adresseur : 6 patients (10 %) seulement adressés par un autre médecin. Groupe CP : 104 (85 %) (âge moyen : 73,3) avec DE (score rigidité < 3) et seulement 19 sans DE (âge moyen : 67,8, score rigidité 3,5) ; 51 (41,5 %) avec traitement (iPDE5 : 25, IIC : 21, autres : 5). Quatre-vingt-quinze pour cent ont approuvé d’être interrogés et informés sur cette problématique même si non demandeur.
Conclusion.– Cette étude observationnelle montre dans un échantillon sélectionné (consultants en urologie d’un hôpital général) 4 faits :
– 20 % seulement des patients avec cancer ont une prise en charge oncosexologique dominée par la DE (92 %), le CP (80 %) et les traitements pharmacologiques (92 %) ;
– le nombre minime de cancers hors urologie (7 %) reflète une probable inégalité d’accès aux soins compte tenu de la prévalence élevée des troubles sexuels liés au cancer hors urologie et que l’urologue est le principal référent organicien chez l’homme ;
– si 85 % des consultants avec CP ont une DE, la moitié seulement a un traitement alors que près de 3/4 souhaiterait une prise en charge ou au moins une information (même les plus agés) ;
– situation plutôt paradoxale dans le CP : quelle que soit sa prise en charge, la moitié des sujets < 70 ans ont déjà une DE ou ne sont pas demandeurs d’un traitement, un tiers des sujets > 75 ans demandent au moins une information.