La transplantation rénale au cur du trafic d’organe et de la prise en charge des réfugiés
La transplantation rénale au cur du trafic d’organe et de la prise en charge des réfugiés
Si on peut se passer d’un rein, sa vente n’en est pas moins illégale en Europe. Cependant, les situations géopolitiques actuelles incitent au contournement des règles bioéthiques en place. Sur les 75 000 greffes annuelles dans le monde, 10 à 15 000 sont issues d’un trafic. Les problématiques de l’accès à la transplantation et du trafic d’organes restent indissociables des mouvements de réfugiés de guerre dont le nombre ne cesse d’accroitre.
En France chaque année, 200 patients sur liste meurent faute de greffe. Les besoins de greffons, les disparités socio-économiques et les impasses du système d’accès à la greffe peuvent inciter le crime organisé, et ce malgré des lois éthiques en place dans de nombreux pays. Un sujet qui a fait l’objet d’une session thématique du comité de transplantation et d’insuffisance rénale chronique de l’AFU, lors du Congrès Français d’Urologie 2017.
Une disparité socio-économique à l’origine des trafics d’organes
Les aspects géopolitiques, notamment les vagues migratoires et les problèmes de trans-nationalités, exercent une pression sur cette problématique éthique, fragile de nature. Les coûts et le profit de la transplantation attirent le crime organisé. Il peut prendre plusieurs formes, des plus violentes avec des prélèvements contre la volonté des personnes, à des formes plus subtiles comme le contournement du libre arbitre ou des détournements de soins d’urgence.
D’après le dernier rapport des Nations Unies, le trafic d’organe représenterait 1% des cas de trafic humains, la 2e source de profits du crime organisé. « Malheureusement, en pratique, il n’y a que peu de preuves explicites de trafic, et donc très peu de poursuites judiciaires qui aboutissent. » a expliqué Olivier Bastien de l’Agence de la biomédecine. « Pour lutter contre ce trafic, il faut maintenir une cohérence internationale. Diminuer les disparités et les inégalités, et favoriser l’accès au développement des programmes de transplantation permettraient de diminuer ce risque de déviance. »
Le suivi exhaustif et fiable des différentes filières du don d’organe, tant en amont dès la constitution du dossier des patients, au tout début de la prise en charge, qu’en aval, reste une des clés pour limiter les trafics. Une vigilance particulière envers les techniques de contournement des filières d’urgence est essentielle.
Un trafic qui profite aux plus riches
L’OMS le souligne, ce sont les pauvres qui vendent aux riches. L’Asie du Sud est devenue le centre du tourisme médical. Chaque année, plus de 2 000 indiens vendent leurs organes aux plus offrants, souvent étrangers et ce mouvement risque d’être amplifié par l’accroissement du nombre de réfugiés qui sont prêts à tout pour survivre.
En Iran, les reins font l’objet d’un commerce. Le gouvernement paie un forfait de 900 à 1200 dollars, complété d’une assurance santé d’1 an et d’un paiement du donneur par le receveur de 2300 à 4500 dollars. Plus de 30 000 greffes ont ainsi été réalisées. Est-ce si absurde sachant qu’un rein sur deux permet une vie normale et que le risque de l’opération est du même ordre que la liposuccion ?
Selon le Pr Delaigue, Professeur d’économie de Lille 1, ce montage n’évite cependant pas le trafic, et certains tentent même d’acheter des reins dans des pays encore plus pauvres à moindres couts. « Donner une somme relativement large d’argent, soulage et déculpabilise la conscience des riches. Mais l’argent est généralement dépensé dans des frivolités, et les conditions de vie des donneurs ne s’améliorent pas pour autant », a complété le Dr Julien Branchereau, urologue. « Ils le regrettent pour la plupart. Après un don de reins, 80% des patients iraniens ont une qualité de vie décrite comme très inconfortable, 75% ont encore des douleurs après 1 an et 76% déconseilleraient l’opération totalement. »