Urofrance.org : le site de l'Association Française d'Urologie

Accueil > Cystectomie : peut-on bien vivre sans vessie ?

Cystectomie : peut-on bien vivre sans vessie ?

On doit vous enlever la vessie et vous vous demandez quelle sera votre qualité de vie une fois celle-ci retirée ? Si l’inquiétude est légitime, la réalité est beaucoup moins sombre qu’elle n’y paraît.

L’ablation de la vessie, également appelée cystectomie, est envisagée notamment pour certains cancers de vessie. Elle est également proposée à des patients atteints de maladies neurologiques entrainant une perturbation du fonctionnement de la vessie avec un risque d’altération de la fonction rénale.

Néo-vessie ou Bricker ?

Pour dériver les urines et les évacuer après une cystectomie, l’urologue dispose de deux options chirurgicales, l’une dite continente et l’autre non continente. Le choix de la technique est abordé en consultation avec le patient. « Le chirurgien peut reconstruire une vessie artificiellement à l’aide de tube digestif (intestin) et créer ce que l’on appelle une néo-vessie continente », explique le Dr Benjamin Pradère, chirurgien urologue à la Clinique Croix-Du-Sud à Toulouse et membre du comité de cancérologie – sous-comité vessie – de l’AFU. « Il s’agit de réaliser une reconstruction à l’intérieur de l’abdomen d’une poche en intestin qui sera reliée directement à l’urètre. Cette technique permet d’obtenir des mictions spontanées et volontaires via l’urètre comme avant l’ablation de la vessie ». L’alternative à cette technique est la réalisation d’une stomie de Bricker. « L’urologue crée un conduit urinaire qui s’abouche à l’extérieur du corps par la peau et qui est relié à une poche au niveau de l’abdomen permettant de recueillir les urines. Les uretères vont ainsi être abouchés à un morceau d’intestin qui va lui-même être abouché à la peau », détaille le Dr Pradère. Cette technique est dite non-continente puisqu’elle consiste à créer un conduit évacuant les urines qui sont recueillies dans une poche à vider régulièrement.

Les pour et contre

Quelle que soit l’option thérapeutique choisie, il est ici question de chirurgies relativement complexes, avec des durées d’hospitalisation s’étalant de 7 jours à 3 semaines. Ces interventions sont proposées en chirurgie ouverte ou en chirurgie robot-assistée. « La technique de la néo-vessie est un peu plus lourde que celle du Bricker, précise le Dr Pradère, car elle nécessite d’utiliser plus d’intestin et la durée opératoire est plus longue ». L’option chirurgicale va dépendre de plusieurs éléments. « Le critère esthétique ou de confort ne peut pas être prioritaire », prévient le spécialiste. Des critères cliniques et oncologiques ainsi que l’âge ou les antécédents médicaux du patient déterminent s’il est possible de lui proposer une néo-vessie ou si le Bricker est plus adapté. « Pour la néo-vessie, l’urologue doit s’assurer que le patient sera en mesure de l’assumer. La néo-vessie présente un avantage certain en termes d’image corporelle, mais également un risque supplémentaire de complications post-opératoires à court et moyen terme qui peuvent être parfois plus importantes que dans les dérivations de type Bricker. La néo-vessie entraine de l’incontinence urinaire (essentiellement la nuit) imposant le port d’une protection et, la nécessité de s’auto-sonder régulièrement. Un patient ne disposant pas de ses pleines capacités motrices, notamment un patient très âgé ou avec de lourds antécédents, rencontrera des difficultés à gérer seul une néo-vessie », remarque le Dr Pradère. Néanmoins, pour les patients jeunes, actifs et motivés, prêts à s’auto-sonder, la néo-vessie s’avère être un choix intéressant. Pour ce qui est de la dérivation urinaire de type Bricker, d’un point de vue de l’image corporelle cela peut être plus difficile à tolérer par certains patients. Elle offre malgré tout l’avantage de ne pas nécessiter d’auto-sondages, elle n’entraine pas de troubles urinaires ou de douleurs pelviennes.
C’est donc bien la motivation et la volonté du patient à accepter tel ou tel désagrément qui pèseront dans la balance pour le choix du type de dérivation à réaliser. Mais attention ! Une fois la technique de dérivation urinaire décidée et la chirurgie réalisée, il sera difficile de revenir en arrière.

Une qualité de vie retrouvée

Passés les premiers mois post-opératoires, plus difficiles en raison des complications qui peuvent survenir et du temps d’adaptation, sur le moyen et le long terme, on remarque une très bonne acceptation des deux techniques de dérivation urinaire. Un accompagnement post opératoire est systématiquement proposé par les médecins et les infirmières spécialisées notamment les stomathérapeutes. Les patients porteurs d’une néo-vessie sont aidés à maîtiser l’auto-sondage. Ceux ayant opté pour la technique du Bricker sont formés à la gestion de la stomie et des poches. « Nous disposons de systèmes relativement bons et sécures et de nombreux professionnels et associations de patients existent pour appréhender cette nouvelle façon d’uriner une fois que la vessie a disparu. La vie du patient ne s’arrête pas le jour où il a une stomie », rassure le Dr Pradère. L’image corporelle se travaille et des systèmes performants pour cacher les stomies ont encore été améliorés. Il est donc possible de vivre normalement. En termes de qualité de vie, la néo-vessie et le Bricker ont montré des résultats similaires sur le long terme. « Plusieurs études ont été réalisées pour comprendre le ressenti des patients en fonction des techniques de dérivation urinaire utilisées. Le Bricker et la néo-vessie présentent des résultats similaires avec une qualité de vie décrite comme tout à fait acceptable », confirme le spécialiste.

Vanessa Avrillon

 

Pour en savoir plus :
Voir les fiches infos patients

Associations de patients :
A.F.E.T. (Association Française d’Entérostoma-Thérapeutes)
Institut National du Cancer
Fondation pour la recherche sur le cancer

Crédit photo : AdobeStock_277574276

Contenu protégé