Déficit en testostérone : de nouvelles recommandations pour améliorer la prise en charge
Publiées en juin dernier dans le journal « Progrès en urologie », les dernières recommandations concernent la prise en charge du déficit en testostérone. Le Dr Faix, ancien responsable du Comité d’Andrologie et de Médecine Sexuelle de l’AFU, Trésorier de l’AFU et corédacteur, revient sur les éléments importants.
Pourquoi de nouvelles recommandations concernant le déficit en testostérone ?
Le terme « andropause » était utilisé en raison de sa ressemblance avec la ménopause mais les professionnels de santé s’entendent aujourd’hui pour employer la terminologie de « déficit en testostérone » (DT). La raison de ce changement d’appellation est due au fait que ces deux situations ne sont pas similaires. En effet, chez l’homme la diminution du taux de testostérone est progressive (1% par an à partir de 30 ans) et variable selon les personnes. Le déficit en testostérone est souvent un phénomène partiel alors que la ménopause représente l’arrêt définitif de la production d’œstrogènes et de progestérone.
Les symptômes du déficit en testostérone sont variés et peu spécifiques. Il s’agit principalement de fatigue, d’une baisse de la libido, de troubles du sommeil, de changements d’humeur… « Cette diversité de signes fonctionnels rend parfois difficile le diagnostic qui peut passer inaperçu à l’examen », précise le Dr Faix. La rédaction des nouvelles recommandations s’est faite à partir d’un triple constat. « Tout d’abord, il existe une demande de la part des patients. Puis, les praticiens méconnaissent cette pathologie. Enfin, il n’y avait pas de recommandations françaises existantes sur la prise en charge du DT » souligne le Dr Faix.
Ainsi, la Société Francophone de Médecine Sexuelle (SFMS), le Comité d’Andrologie et de Médecine Sexuelle (CAMS) de l’Association Française d’Urologie (AFU) ont élaboré des recommandations françaises pour la prise en charge du déficit en testostérone (DT) en collaboration avec des endocrinologues, des sexologues et des urologues.
L’objectif était d’élaborer un ensemble de recommandations réunies dans un document de référence. Celui-ci pourra également servir aux médecins généralistes comme outil de diagnostic et de prise en charge du déficit en testostérone.
« Quand faire un dépistage ? Sur quel(s) signe(s) d’appel, comment le traiter ? Quels sont les risques des traitements à envisager avec les patients ? Quand adresser le patient à un spécialiste et vers quel spécialiste ? Voici une liste de questions importantes auxquelles nous avons souhaité répondre », précise le Dr Faix.
Quels sont les principes de la prise en charge du déficit en testostérone ?
Les symptômes du déficit en testostérone se présentent sous la forme d’une baisse de la libido, d’une difficulté à obtenir ou à maintenir une érection, ou d’une perte des érections nocturnes. Les symptômes non sexuels les plus fréquents sont la fatigue, une diminution de la masse musculaire, une augmentation du tissu adipeux, une irritabilité, une baisse de l’humeur accompagnée d’un état dépressif. En présence de tels symptômes, une prise de sang avec dosage de la testostérone totale peut être réalisée. Cependant, il convient de prendre les résultats avec prudence, indique le Dr Faix. « Les normes des laboratoires sont restrictives, et bien que l’on retienne le seuil de 3,5 ng/mL, un taux apprécié comme normal ne l’est pas automatiquement pour tous les patients. Il ne faudra donc pas hésiter à réaliser un traitement d’épreuve en cas de suspicion forte sans argument biologique ».
Le Dr Faix ajoute également que : « le dosage de la testostérone totale ne paraît pas être le meilleur reflet de la testostérone pour tous les patients. En effet, avec l’âge, la globuline liant les hormones sexuelles, la Sex Hormone Binding Globulin (SHBG), augmente. Cette glycoprotéine se lie aux hormones sexuelles, en particulier à la testostérone. Une part plus importante de la testostérone va se lier à cette protéine et donc en réalité être inactivée ».
Ainsi, un meilleur reflet hormonal serait obtenu par le dosage de la testostérone biodisponible ou mieux, de la testostérone libre.
En cas de diagnostic ou de suspicion de déficit en testostérone, malgré des analyses biologiques normales, un traitement par supplémentation de testostérone sera indiqué. Il sera nécessaire au préalable de s’assurer de l’absence de cancer de prostate, par toucher rectal et par dosage de PSA total. Il faudra également vérifier l’absence de cancer du sein par un examen clinique ainsi que l’absence d’anomalie de production des globules rouges (polyglobulie) par dosage de l’hématocrite.
Le traitement par supplémentation de testostérone
En France, cinq spécialités de testostérone sont disponibles présentant des avantages et des inconvénients.
Les capsules à prendre par voie orale au cours des repas sont remboursées par la Sécurité sociale. Cependant, elles n’offrent pas des concentrations stables de testostérone et leur absorption fluctue en fonction de la teneur en lipides des repas.
Le gel transcutané en application quotidienne est facile d’utilisation, mais n’est pas remboursé par la Sécurité sociale. Il offre une bonne stabilité des concentrations de testostérone.
L’injection intramusculaire à raison d’une ou deux fois par mois, est responsable de fluctuation des taux de testostérone dans l’intervalle des injections. Seule une injection toutes les 2 à 4 semaines est remboursée par la Sécurité sociale.
L’efficacité et la tolérance du traitement s’évaluent entre 3 et 6 mois après l’initiation thérapeutique. Outre le dosage biologique de la testostérone, le Dr Faix recommande « une réévaluation clinique complète du patient, en sachant que certains symptômes peuvent mettre plus de temps à s’améliorer » Il rappelle : « on ne traite pas un bilan biologique, mais un patient avec des symptômes ».
Rappelons que la prescription initiale de ce traitement hormonal substitutif est réservée aux urologues et aux endocrinologues. Toutefois, le renouvellement de ce traitement au long cours pourra se faire par le médecin traitant. Il est donc impératif que les médecins traitants soient informés de cette prise en charge de la DT.