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CHIRURGIE DES CANCERS DE LA VESSIE ET DES VOIES EXCRETRICES SUPERIEURES : Principes de résection endoscopique d’une tumeur de vessie

Auteurs : Marc MAIDENBERG, Jean-Louis DAVIN Référence : Prog Urol, 2005, 1073 Mots clés : Cancer, Chirurgie, Endoscopie, Vessie

La résection endoscopique est une étape essentielle de la prise en charge d’une tumeur de vessie : le but de la résection est double :

a) permettre un diagnostic histologique précis dont découlera l’indication thérapeutique.

b) être la première étape thérapeutique.

I. Etape pré-opératoire

Lorsque le diagnostic de « tumeur » vésicale a été posé, de quels examens dispose l’urologue avant de pratiquer la résection endoscopique ?

1. La cysto-fibroscopie réalisée en soins externes sous anesthésie locale( au gel stérile de Xylocaine) est un geste très utile, permettant l’établissement d’une cartographie vésicale et une première appréciation de l’importance des lésions vésicales. Les orifices urétéraux seront repérés et une éjaculation claire ou sanglante pourra être constatée.

2. La cytologie urinaire mictionnelle c’est le matériel idéal, complémentaire de la cystoscopie et des biopsies, utile surtout dans le dépistage et la surveillance des lésions planes de haut grade. Cet examen, qui explore tout l’arbre urinaire, se pratique sur des urines « fraîches » au mieux émises au laboratoire et étudiées dans les heures qui suivent leur recueil par un cytologiste entraîné (La première miction du matin et les urines de 24 heures seront refusées de principe en raison des altérations cellulaires que ce mode de recueil entraîne).

3. L’imagerie les indications respectives de l’U.I.V, de la T.D.M.et de l’I.R.M. sont discutées dans un chapitre spécifique. Lorsque une infiltration musculaire est suspectée notamment sur les données clinique et endoscopique préopératoires, il est préférable de réaliser la T.D.M. ou l’IRM avant la résection endoscopique, ce qui évitera les artéfacts liés à l’intervention qui subsistent pendant 3 à 4 semaines en post-opératoire.

4. La consultation de pré-anesthésie comme pour toute intervention, est obligatoire : la résection endoscopique nécessite des urines stériles et un ECBU sera donc contrôlé dans les jours qui précèdent l’intervention.

5. L’information du patient : Outre les principes généraux communs à toutes les interventions, il est important d’expliquer que la résection endoscopique est un temps obligatoire et incontournable devant toute lésion vésicale et qu’en l’absence de diagnostic précis, de traitement, puis de surveillance, le risque est de laisser évoluer une lésion potentiellement cancéreuse. Dans cet esprit, il est possible de prévoir d’emblée la date de la consultation post-opératoire au cours de laquelle le patient sera informé du diagnostic histologique précis, et de la conclusion de la réunion de R.C.P le concernant.

II. La résection endoscopique des tumeurs de vessie

Elle se déroule selon des principes parfaitement codifiés.

1. Examen clinique

L’intervention, menée sous anesthésie générale ou locorégionale, débute par les touchers pelviens bi manuels ; en cas de volumineuse tumeur notamment, on appréciera la mobilité de la vessie par rapport aux organes adjacents (rectum) et son éventuelle fixité sur le plancher pelvien.

2. Introduction de l’endoscope

L’endoscope, introduit sous contrôle de la vue permet ensuite une inspection soigneuse de toute la filière uréthro-vésicale.

Le siège, le nombre, la taille et l’aspect des lésions vésicales (et urétrales) seront notés soigneusement et reportés sur un schéma qui fait partie du dossier médical. Si cela est possible, la prise de photographies est un apport intéressant.

Les orifices urétéraux seront repérés et l’éjaculation urétérale observée (urine claire ou sanglante).

3. Cytologie urinaire

Si une cytologie urinaire n’a pas été réalisée auparavant, il est possible de pratiquer, avant de débuter la résection, une cytologie urinaire par lavage vésical (ne pas utiliser le glycocolle mais l’eau distillée).

4. Résection endoscopique

La résection (sous double courant) peut alors débuter ; pendant toute la durée de l’intervention une palpation sus pubienne régulière contrôle l’absence de distension vésicale.

a) Tumeur d’aspect bien différencié, de petite taille, d’implantation pédiculée : c’est le cas le plus simple, car on est manifestement en présence d’une lésion de stade Ta, et de grade 1 ou 2.

b) Tumeur d’aspect moyennement ou peu différencié, et/ou d’implantation sessile, peu exophytique : il faut réaliser une résection endoscopique complète de toute la tumeur et cette résection doit comporter un geste suffisamment profond pour concerner les couches musculaires vésicales.

Dans ce cas, il est possible de prélever, en les différenciant, puis en les conservant dans des flacons séparés, la partie exophytique de la tumeur, et les couches profondes concernant le muscle vésical. Ces données seront précisées sur la demande d’examen histologique.

c) Localisations multiples : avant de débuter la résection, il est recommandé de repérer la localisation précise des différentes localisations tumorales afin d’éviter de méconnaître une lésion dont l’identification pourrait être rendue plus difficile en cours de résection du fait des inévitables saignements troublant le liquide intra vésical. Ces différentes localisations, prélevées « quadrant par quadrant » pourront être notées sur le document destiné au laboratoire d’histologie, et sur le compte-rendu opératoire, ce qui sera très utile au cours de la surveillance ultérieure.

Différentes situations peuvent se rencontrer :

• cohabitation de tumeurs d’aspect superficiels et infiltrants : le pronostic est lié à la tumeur la plus infiltrante, et de très petite lésions peuvent être simplement électro-coagulées .

• polypose vésicale diffuse : il est parfois impossible d’en pratiquer la résection complète en une seule séance, et, plutôt que de prolonger au-delà d’un temps raisonnable l’intervention, il ne faut pas hésiter à remettre la fin du geste quelques jours ou semaines plus tard .Cette situation est souvent prévisible en préopératoire et le patient en aura été averti.

d) Aspect de carcinome in situ : il est très important, étant donné ses implications thérapeutique, de ne pas méconnaître la présence de carcinome in situ, notamment si une lésion d’aspect superficiel et bien différencié a par ailleurs été à l’origine du diagnostic :

• En préopératoire,

– des symptômes tels que impériosités, sensation de brûlures vésicales alors que l’E.C.B.U. est stérile, doivent y faire penser.

– une cytologie urinaire mictionnelle de type tumorale, accompagnant une lésion d’aspect superficielle et bien différenciée, doit faire suspecter un carcinome in situ associé, ou une localisation du haut appareil.

– la cystoscopie peut révéler un aspect typique (lésion plane, inflammatoire de la muqueuse vésicale)

• En peropératoire,

L’examen attentif de l’urèthre et de la vessie, avant tout geste de résection, permet d’identifier des zones suspectes (repérées lors de la cystoscopie effectuée en consultation) ; ces zones seront prélevées soit à l’anse du résecteur, soit à la pince à biopsie froide qui permet d’obtenir un tissu de meilleure qualité -car indemne de toute électrocoagulation – pour l’analyse histologique.

5. Volumineuse tumeur manifestement infiltrante

Si une telle tumeur n’est pas résecable en totalité, il faudra s’attacher à obtenir des copeaux de sa base d’implantation : le but est de faire un diagnostic histologique précis du degré d’infiltration, base de la décision thérapeutique ultérieure.

6. Lésion vésicale située à proximité immédiate d’un orifice urétéral

la résection obéit aux mêmes règles : enlever toute la lésion et permettre un diagnostic histologique précis ; le geste de section doit être franc et si besoin emporter une partie du méat .La coagulation sera limitée au strict nécessaire afin de minimiser le risque de sténose du méat ; en cas de doute sur le fonctionnement correct du méat urétéral, il est possible, en fin de résection, de faire un test en injectant de l’Indigo carmin en intraveineux. Une échographie rénale à 6 semaines post opératoire permet de vérifier, en cas de doute, si une dilatation des cavités rénales est apparue.

7. Tumeur siégeant dans un diverticule

le diverticule vésical pose le problème de l’absence complète ou partielle de fibres musculaires l’examen de la vessie et de tous les diverticules doit être particulièrement attentif, afin de ne pas méconnaître une ou plusieurs lésions.

Dans un diverticule, une petite formation d’aspect bien différencié, sera enlevée en totalité.

En revanche, une lésion de grande taille, implantée dans la paroi diverticulaire, et d’aspect manifestement infiltrant, ne sera réséquée que partiellement : en cas d’absence de couche musculaire c’est le grade tumoral qui intervient dans la décision thérapeutique de ces tumeurs d’emblée infiltrantes.

8. Attitude vis-à-vis du col vésical et /ou de la prostate

D’une façon générale, il est préférable de ne pas associer les gestes de résection de tumeur vésicale et d’adénome prostatique pour éviter le risque de « greffe » au niveau de l’urètre prostatique. Si une résection endoscopique d’un adénome s’avère nécessaire, il est préférable de l’envisager secondairement.

• En cas de dysurie liée à une maladie du col vésical, une incision cervico-prostatique peut être envisagée et ce d’autant plus que la lésion vésicale permet de prévoir l’indication d’instillations endo-vésicales en post opératoire (facilité du cathétérisme vésical et traitement du résidu post mictionnel).

• lorsque la tumeur vésicale laisse envisager qu’un geste radical sera nécessaire, il peut être utile de pratiquer d’emblée des biopsies de l’urèthre prostatique soit à l’anse du résecteur soit, soit à la pince à biopsie froide à 5 et 7 heures.

9. Comment terminer une résection endoscopique de tumeur de vessie ?

La vérification de la qualité de l’hémostase est un temps essentiel notamment en cas de résection profonde et/ou multiple. Pour cela, il faudra éviter que la vessie ne soit trop pleine (la pression pouvant masquer un saignement qui reprendra dès la mise en place de la sonde vésicale).

La vérification que la résection a bien concerné toutes les formations tumorales est un temps indispensable ce qui n’est pas toujours aisé notamment dans les vessie de lutte marquées (diverticules en particuliers) : bien dérouler les faces latérales et le dôme vésical, en s’aidant de la palpation sus-pubienne, permet d’avoir accès à des zones difficiles à explorer comme la région cervicale antérieure (intérêt à nouveau, de la cystoscopie préopératoire au fibroscope souple).

Ces contrôles effectués, le résecteur peut être retiré et une sonde vésicale siliconée de bon calibre (Ch 20 ou 22) à double courrant est mise en place après lubrification de l’urèthre au gel de Xylocaine stérile. La durée du lavage et du sondage varie de 2 à 4 jours en moyenne, la sonde pouvant être retirée dés que les urines sont redevenues claires.

Dans le cas particulier d’une petite lésion une sonde à voie unique peut n’être gardée que quelques heures, une diurèse abondante permet un lavage vésical suffisant.

Lorsque la résection est peu étendue (<5 cm), l’hémostase satisfaisante et en l’absence de perforation vésicale complète, un instillation de Mitomycine C peut-être faite en post-opératoire immédiat pour diminuer le risque de récidive. Le produit sera laissé dans la vessie pendant 2 heures avant de déclamper la sonde et reprendre le lavage.

III. Conclusion

La résection endoscopique des tumeurs de la vessie est un geste opératoire parfois délicat, voire difficile dans certaines localisations tumorales en cas, de tumeurs volumineuses qui obéit à des règles précises et codifiées.

C’est une étape essentielle et obligatoire dans la démarche diagnostique et thérapeutique de cette pathologie.

Une bonne coopération entre l’urologue et le pathologiste contribue à l’amélioration de la qualité de la prise en charge du patient.

Références

1. BASTACKY S, IBRAHIM S, WILCZYNSKI SP, MURPHY WM. The accuracy of urinary cytology in daily practice. Cancer. 1999 ; 87 (3) : 118-28.

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3. GATTEGNO B, CHOPIN D. Rapport 2001 de l’Association Française d’Urologie. Prog. Urol. 2001 ; 11 (5) : 993-1019.

4 .Recommandations 2004 en Onco-Urologie ­ Comité de Cancérologie de l’Association Française d’Urologie. Prog. Urol. 2004. 14. (4 Supp n°1) 461-996.

5. ZERBIB M, BOUCHOT O. Les traitements des Tumeurs Infiltrantes de Vessie. Rapport 2002 de l’Association Française d’Urologie. Prog.Urol. 12 (5) : 769-772.

6. BARTHOLIN J, KRARUP T,WALTER S and THERKILDSEN MH.Carcinoma implant in the abdominal wall after transurethral resection of bladder tumors using suprapubic trocar.A report of 3cases.Scand J Urol Nephrol Suppl,1995172:p:43-4

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