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CHIRURGIE DES CANCERS DE LA VESSIE ET DES VOIES EXCRETRICES SUPERIEURES : Pathologie des cancers de la vessie

Auteurs : Catherine MAZEROLLES Référence : Prog Urol, 2005, 1067 Mots clés : Cancer, Chirurgie, Vessie

L’étude morphologique des copeaux de résection doit permettre la caractérisation de la tumeur urothéliale en ce qui concerne son degré d’agressivité (grade) et de son degré d’infiltration pariétale (stade). Cette caractérisation est fondamentale pour sa prise en charge.

I. Réalisation et acheminement du prélèvement

Il importe de proposer au pathologiste un matériel d’abondance suffisante et qui ne soit pas trop remanié par des lésions d’arc. Le prélèvement devra être suffisamment profond pour intéresser la musculeuse. Les copeaux réalisés au niveau de la base d’implantation tumorale peuvent, mais cela est optionnel, être envoyés dans un flacon séparé de la partie superficielle de la tumeur. Ces fragments sont envoyés frais ou fixés selon les possibilités d’acheminement rapide au laboratoire. Les prélèvements sont toujours assortis d’un bon d’identification du patient qui comporte des renseignements cliniques indispensables: antécédents carcinologiques urologiques et non urologiques, thérapeutiques déjà réalisées, mais aussi des éléments descriptifs de la tumeur (taille, siège, aspect). Ces renseignements sont nécessaires à une bonne interprétation des images. Par exemple : un carcinome peu différencié de la vessie chez un patient connu pour un carcinome de prostate traité par hormonothérapie doit faire évoquer en premier lieu une extension de sa lésion prostatique, à plus forte raison si cette tumeur infiltre le col et le trigone ; des atypies en zone plane chez un patient antérieurement traité par Mitomycine C ne doit pas faire soulever un diagnostic de CIS, mais une cystite réactionnelle à cette molécule…

II. L’évaluation du grade

Elle repose sur les caractères morphologiques des cellules tumorales : atypies, index mitotique, conservation de la polarité, maturation urothéliale. Actuellement le système de grading de référence est le système OMS 2004 avec trois niveaux (LMP, carcinomes de bas et haut grade de malignité). Il est recommandé de fournir encore au clinicien une évaluation dans l’ancienne classification OMS 1973 (grade 1,2,3). L’hétérogénéité du grade des tumeurs urothéliales est un phénomène fréquent. De façon consensuelle il faut grader la tumeur selon le contingent le plus agressif dès lors qu’il représente 5% du contingent tumoral. Le pathologiste peut, mais c’est optionnel, traduire dans sa conclusion cette hétérogénéité en précisant approximativement le pourcentage des grades présents, par exemple “carcinome de haut grade de malignité qui comporte 20% de haut grade et 80% de bas grade de malignité”. Les tumeurs de vessie infiltrantes ont la particularité d’être fréquemment le siège de différenciations divergentes ou « contingents variants »* . Les plus courantes et les plus connues sont la métaplasie malpighienne et glandulaire. D’autres, sont moins connues mais doivent être signalées. Elles se caractérisent en effet souvent par une évolution particulière, souvent, mais pas toujours, plus péjorative qu’un carcinome urothélial classique. Elles doivent donc être prises en compte dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique du patient (en particulier dans la décision de la réalisation d’une résection de contrôle en cas de tumeur pT1).

III. L’évaluation du stade

Le degré d’infiltration pariétale est toujours difficile à apprécier sur matériel de résection en raison du caractère fragmenté, désorienté et remanié des prélèvements soumis à l’analyse. Ces modifications sont liées à la fois au traumatisme de la résection réalisée sur une lésion souvent friable et aux techniques d’inclusion et de coupe nécessaires à l’examen morphologique. Les structures pariétales, recoupées en tout sens sont moins facilement identifiables par le pathologiste et des phénomènes d’écrasement peuvent artificiellement entraîner des lambeaux d’urothélium entre les trousseaux musculaires et dans les lumières vasculaires.

L’infiltration du chorion lorsqu’elle est débutante doit être différenciée de boyaux invaginés ; elle peut être masquée par un infiltrat inflammatoire et sera alors révèlée par la réalisation de techniques immunohistochimiques. Depuis quelques années, un système de subdivision du stade T1 en 2 niveaux a été proposé par de nombreux auteurs et, bien qu’il n’ait pas été adopté comme standard dans la classification TNM 2002, il est conseillé de le mentionner lorsque cela est possible. On distingue ainsi: le stade pT1a (infiltration du chorion superficiel) et pT1b (franchissement de la musculaire muqueuse et infiltration du chorion profond.) En l’absence de musculaire muqueuse, le repérage de la partie médiane du chorion peut être facilité par la présence de gros vaisseaux situés dans le chorion à mi-distance entre l’urothélium et la musculeuse propre. A signaler que la musculaire muqueuse n’existe pas au niveau du col et des méats péri-uretéraux et qu’elle est inconstante au niveau du trigone. Au niveau du col, la musculeuse propre est plus superficielle et constituée de trousseaux grêles et superficiels. L’interprétation de l’origine des faisceaux de fibres musculaires lisses (musculaire muqueuse et musculeuse) impose donc la connaissance du site de prélèvement.

L’infiltration du muscle est le paramètre fondamental dans l’appréciation du pronostic de la tumeur et de sa prise en charge. Il est donc nécessaire d’examiner une résection profonde intéressant la musculeuse. Si le détrusor n’est pas présent sur la résection, l’infiltration peut être sous estimée et il faut le signaler. Dans une telle circonstance, en cas de tumeur infiltrant le chorion le stade peut être noté en conclusion «pT1 au moins».

Il faut veiller à ne pas porter à tort le diagnostic d’infiltration de la musculeuse et savoir se méfier de l’infiltration de trousseaux de fibres musculaires lisses hyperplasiques en provenance de la musculaire muqueuse et de certaines réactions stromales fibroblastiques qui accompagnent parfois l’infiltration des massifs carcinomateux dans le chorion. La réalisation d’un examen immunohistochimique avec l’anticorps anti-desmine peut aider à une meilleure caractérisation de ces trousseaux musculaires lisses. Le stade pT2, sauf dans certaines zones de la vessie (col, et à un moindre degré trigone), impose la présence d’une infiltration de volumineux trousseaux de fibres musculaires lisses.

Si, sur pièce de cystectomie il faut différencier l’infiltration superficielle du plan musculaire (pT2a) de l’infiltration profonde (pT2b), cela n’est pas possible sur matériel de résection. Si l’infiltration est massive et laisse présager un franchissement de la musculeuse, on peut noter le stade «pT2 au moins».

Enfin il faut signaler la présence de foyers de carcinome in situ, en particulier à distance de la tumeur, et la présence d’emboles vasculaires même si ces deux caractères ne modifient pas le stade.

* Note de l’auteur : Un contingent de type variant est un contingent tumoral vésical infiltrant qui montre une différenciation divergente. Certains de ces contingents peuvent ressembler à des lésions bénignes et être à l’origine de retards diagnostiques alors que ces lésions se caractérisent par une évolution agressive (ex variant à type de nids ). D’autres contingents variants ressemblent à des carcinomes non urothéliaux et doivent faire dédouaner une métastase (ex variant micropapillaire ou plasmocytoïde).

Références

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